Chanson idiote ou
chanson sérieuse ? Texte superficiel ou message caché ? Nous vous
laissons le soin de faire votre propre opinion. A la première écoute
cette histoire d'une ruralité marécageuse à tendance batracienne
ne retient pas particulièrement l'attention. Si ce n'était sa
mélodie simpliste et entêtante on n'en retiendrait pas grand chose.
Mais elle mérite sans doute mieux que d'être classée dans les
facéties et divertissements pour enfants.
Pour écouter la
chanson et lire la suite:
Sous cette forme la
chanson du petit guernouillon est uniquement connue dans l'ouest de
la France. Elle y est malgré tout bien implantée en Vendée et
Haute Bretagne. Rien que dans notre beau département de
Loire-Atlantique elle a été collectée du Pays de Retz au pays de
la Mée, de l'estuaire de la Vilaine aux rives de la Loire. Bref, à
peu près partout. Elle présente une parenté évidente avec une
autre chanson “Au printemps, la mère ageasse fit on nid dans un
buisson” avec qui elle partage le plus souvent le même refrain.
La version que nous
vous présentons, entendue par Fernand Gueriff en presqu’île
Guérandaise, fait exception pour ce qui est du refrain, justement.
Là où la grande majorité des interprètes a retenu les formules du
style:
La pibole...
pibolons
ou
Pie volette...pie
volons
elle nous gratifie
d'un
la guedaine...la
guedon
qu'on ne retrouve
que dans ce secteur, proche de l'océan.
Si le refrain fait
souvent l'unanimité, l'histoire hésite, en revanche, entre deux
options. Nous avons ici une fin heureuse ou l'on remercie la
grenouille sauveteuse. Dans d'autres c'est tout le contraire et on
maudit la grenouille qui l'a happé par le talon avec des intentions
bien moins secourables. Plus rare encore sont les exemples où le
petit bonhomme s'en sort tout seul en s'accrochant à la ligne d'un
pêcheur.
S'il en est arrivé
là c'est à cause de sa marraine. Fâcheuse tradition qui veut qu'on
se serve des prénoms du parrain ou de la marraine au moment de
déclarer une naissance. On ne choisit pas son prénom; il peut
effectivement être préjudiciable d'en porter certains. De là à en
faire une chanson, l'argument est un peu léger; comme la chanson
elle même.
Pourtant, il est
difficile de ne pas apercevoir dans ce texte anodin des références
bibliques évidentes. Le guernouillon est-il un nouveau Moïse sauvé
des eaux ? La fille du pharaon s'est-elle transformée en grenouille
? D'autres versions de la chanson insistent davantage sur le
sauvetage qui permet au nouveau né d'éviter de se faire happer par
un gros poisson. Ce n'est plus Moïse, c'est Jonas.
Autre possibilité
pour expliquer le succès de cette histoire simple c'est qu'elle fait
écho à des problèmes que nous ne connaissons plus mais qui
étaient, hélas, très préoccupants autrefois. Il n'est pas
nécessaire de remonter si loin pour trouver d'effrayantes
statistiques de mortalité infantile. Avant les progrès de l'hygiène
et de la médecine les chances pour un nouveau né de dépasser l'âge
de 3 ans se jouaient pratiquement à pile ou face. Rien d'étonnant
donc qu'une chanson banalise la mort d'un enfant pas forcément
désiré. Sans aller jusqu'à évoquer l'infanticide, qui d'entre
vous n'a jamais entendu l'expression: il ira loin si les petits
cochons ne le mangent pas. Pour l'occasion ce sont les poissons qui
ont repris le rôle des cochons.
Sous ses dehors
facétieux et divertissants cette chanson est-elle en définitive une
manière détournée de poser un problème sérieux ? A vous de
juger. Et surtout de chanter.
interprète:
Yannick Elain
source: Le
trésor des chansons populaires folkloriques du pays de Guérande,
Fernand Gueriff, tome 4 page 322 (Dastum 44 / Parc naturel régional
de Brière - 2013) Chanté par Louis Leroux, charcutier, originaire
de La Turballe, 63 ans en 1966.
catalogue P.
Coirault: Le garçon mordu par une grenouille (11403 -
coq-à-l'âne et facéties)
catalogue C.
Laforte: Le petit garçon et la grenouille, I,P-23
Quand je sis venu au
monde,
je n’étais ni
gros ni long, la guedaine,
je n’étais ni
gros ni long, la guedon.
On m’y foutit pour
marraine
La cousine à mon
tonton.
On me menit au
baptème
Env’loppé dans un
torchon.
Ma marrain’
qu’était point fine
M’affublit d’un
vilain nom.
Mes parents qui
m’aimaient guère
A caus’ de ce vilain nom
A caus’ de ce vilain nom
M’y foutirent dans
la rivière
Caté tous les gros poissons.
Caté tous les gros poissons.
Heureus’ment
qu’un’ mèr’ guernouille
Me prit pour son
guernouillon.
Remercions la mèr’
guernouille
Et tous ses p’tits
guernouillons
La moral’ de cette
histoire,
C’est d’avoir un
joli nom.
j'ai appris ce chant avec qq variantes dans les années 1960 avec un copain de classe (collège-lycée de Campostal, Rostrenen) qui était de Plaintel, et qui par la suite fut surnommé logiquement Guernouillon (il disait plutôt Gornouillon)
RépondreSupprimervoir mon commentaire (gars de Plaintel en classe à Rostrenen)
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