Encore une chanson d'amour pour rester
dans l'actualité de la Saint Valentin. Sous prétexte de fêter les
amoureux, c'est la grande semaine du bouquet de roses et des petits
cadeaux ; il faut bien faire marcher le commerce ! Tant pis
si les affaires prennent le pas sur les sentiments.
C'est exactement ce qui se passe dans
la chanson que nous avons choisi : un grand classique des textes
où les amoureux sont éconduits par les parents pour des motifs
divers, essentiellement financiers. Habituellement cette chanson
débute par : « j'ai fait une maîtresse ». Celle
chantée par Marie Barthélémy, de Sion les mines, nous parle d'une
« connaissance ».
pour écouter la chanson et lire la
suite :
Le terme maîtresse n'a plus tout à
fait, aujourd'hui, le sens qu'on lui donnait autrefois. Cela explique
peut-être le choix d'utiliser le terme « connaissance »
pour désigner la petite amie ou bonne amie de l'amoureux. C'est à
dire que leurs relations sont déjà sérieuses mais qu'on n'en est
pas encore aux fiançailles.
Dans ce type de chansons, les raisons
du refus parental sont toujours liées à la condition du gars. La
jeunesse ne semble qu'un prétexte qui s'efface derrière la
sentence :
Ma fille n'est point pour vous
Des considérations bassement
matérielles l'emportent sur les sentiments. La richesse des parents
fait passer le prétendant pour un coureur de dot. Ailleurs (1) on
exprime crûment :
Un garçon qui n'a rien
Ne mérite pas mon bien
Ne mérite pas mon bien
ou encore (2) :
je n'ai pas bercé ma fille
si belle et si gentille
pour un garçon comme vous
Parfois c'est le frère de la jeune
fille qui plaide en sa faveur
C'est un garçon d'honneur
faut lui donner ma sœur
Mais c'est peine perdue. Alors débute
cette série de couplets qui rendent la séparation moins pénible,
au moins pour l'auditeur. Le même stratagème se répète pour
tenter d'attirer le garçon dans la chambre. On y ajoute quelquefois
un épisode où il est question d'aller chercher :
Un couteau pour partager la pomme
que j'ai dans ma pochette
nous la mangerons tous deux
en faisant nos adieux
Encore une façon de croquer la pomme !
Mais attention aux conséquences ; les pommes ont des pépins et
c'est dans une version collectée par J. Garneret (3) qu'on entend la
mère ajouter :
si ma fille a fait faute
elle en boira la sauce et le poisson
A la fin de la chanson, le garçon
dépité parle souvent de se faire ermite dans les bois ; un
argument qu'on a déjà entendu ailleurs. Mais point de cela avec
notre amoureux qui veut se retirer
dans un régiment de filles pour
contenter mon envie.
Drôle de façon d'exprimer son chagrin ! Et il n'est pas le seul à procéder ainsi, même avant le passage où la fille tente de l'attirer dans sa chambre. Ainsi, Achille Millien (4) cite ce couplet :
Drôle de façon d'exprimer son chagrin ! Et il n'est pas le seul à procéder ainsi, même avant le passage où la fille tente de l'attirer dans sa chambre. Ainsi, Achille Millien (4) cite ce couplet :
Je me retirerai dans un couvent de
femmes
où y'a de jolies dames, un beau couvent doré.
où y'a de jolies dames, un beau couvent doré.
Autres similitudes entre cette version
et la notre : la mélodie est une des plus proche et le couplet
final, plutôt rare, est identique :
J'ai fait l'amour pour d'autres
D'autres la feront pour moi
En effet, si la trame et certaines
paroles de cette chansons paraissent immuables, les mélodies en sont
fort variables. De même, rarement une chanson aux paroles si proches
d'une version à l'autre aura utilisé autant de prénoms féminins.
Au hasard et dans l'ordre alphabétique voici : Alice,
Augustine, Céline, Fanchette, Jeannette, Justine, Marguerite, Mélie,
Nanette, Rosette...liste non limitative parce que nous n'avons pas la
prétention de les connaître toutes.
Quand à savoir l'origine de cette
histoire mi tragique, mi-comique, il faudrait sûrement remonter très
loin. Certains ont vu dans le geste de couper l'alliance un symbole
remontant aux temps de la chevalerie et de l'amour courtois.
Notes
1 – dans une version notée dans le
Segréen – tout près du pays de Chateaubriant - par François
Simon (chansons populaires de l'Anjou – 1929 – p. 207)
2 – traditions et chansons de
Haute-Bretagne – Louisette Radioyes – t. 2 p. 121
3 – chansons populaires comtoises –
Garneret et Culot – t. 2 p. 453
4 – chansons populaires du Nivernais
et du Morvan – A. Millien – t.2 p. 208
interprète : Jean-Louis
Auneau
source : Marie Barthélémy,
de Sion les Mines (44) enregistrée par patrick Bardoul 22 58
catalogue P. Coirault :
prête moi ton mouchoir (demandes en mariage N° 04708)
catalogue C. Laforte : galant
retirez vous II, E-23
J'ai fait une connaissance ) bis
Trois jours y'a pas longtemps )
J'irai la voir dimanche
Lundi sans plus attendre
Mardi sans plus tarder
J'irai la demander
La mère par la fenêtre
Qu'entendit ce discours
Ma fille est trop jeunette
pour parler d'amourettes
Galant retirez vous
Ma fille n'est point pour vous
S'il faut que j'm'y retire
Je m'y retirerai
Dans un régiment d'filles
Contenter mon envie
Dans un régiment très loin
Contenter mon chagrin
Rosette ma Rosette
prête moi tes ciseaux
Pour couper l'alliance
Que nous avons ensemble
L'alliance et l'amour
Que nous aurons toujours
De ciseaux dans ma poche
Non, non je n'en ai point
Ils sont dans ma chambrette
sur ma table de toilette
Tout auprès de mon lit
Cher amant allons y
Aller dans ta chambrette
Non, non je n'irai point
Ta mère est trop méchante
Quand elle nous voit ensemble
Ton père encore bien pire
Quand il m'y voit venir
Rosette ma Rosette
prête moi ton mouchoir
Pour essuyer les larmes
Qui coulent sur mon visage
Les larmes de mes yeux
C'est pour te dire adieu
De mouchoir dans ma poche
Non, non je n'en ai point
Ils est dans ma chambrette
sur ma table de toilette
Tout auprès de mon lit
Cher amant allons y
Aller dans ta chambrette
Non, non je n'irai point
Ta mère est trop méchante
Quand elle nous voit ensemble
Ton père encore bien pire
Quand il m'y voit venir
Rosette ma Rosette
Fais moi donc un bouquet
De trois boutons de rose
J'ai fait l'amour pour d'autres
D'autres la feront pour moi
Rosette embrasse moi
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