Comme vous l'avez noté dans notre
rubrique actualités, Dastum 44, propose prochainement deux ateliers
sur la base du répertoire local. Le premier est consacré aux
collectes d'Abel Soreau, que nous avons largement utilisées dans ce
blog. Le second passe en revue les chansons composées sur des
timbres. C'est ce qu'illustre la chanson de la semaine.
Le scandale du blé est un texte
imprimé sur feuille volante. Nous n'avons pas réussi à dater
précisément sa création. Mais l'augmentation des prix des produits
alimentaires ou les difficultés des professionnels de l'agriculture
sont des sujets récurrents. Ils font débat encore aujourd'hui et ce
pamphlet peut certainement s'appliquer à plusieurs époques
lointaines ou récentes.
Ce qui nous intéresse ici c'est que la
chanson utilise un timbre. C'est à dire que son auteur pour en
faciliter l'interprétation a choisi un air connu d'un grand nombre
de personnes. Les acheteurs de la feuille volante pouvant ainsi la
chanter eux même sans avoir besoin de lire la musique ou d'en
apprendre une nouvelle.
pour écouter la chanson et lire la suite:
Sans nous attarder particulièrement
sur cette affaire de blé, signalons que la feuille volante en
question a été imprimée et distribuée à la foire de Guérande.
C'est là que se l'est procurée Constance Crusson, chanteuse de la
Baule, collectée dans les années 80 par Roland Brou.
La Paimpolaise est certainement le
timbre le plus employé dans la première moitié du vingtième
siècle...et après. Le grand succès de Théodore Botrel, popularisé
par l'auteur lui même et aussi par Mayol, a servi de base à toutes
sortes de chansons : patriotiques, tragiques, comiques, locales,
familiales...Il a même pris le relais, pour les complaintes
criminelles, du grand tube du siècle précédent ; la
complainte de Fualdès.
L'air de Fualdès, depuis 1817 date de
« l'affaire » qui a secoué la ville de Rodez et la
France toute entière, a servi de supports à une majorité de
chansons relatant des crimes ainsi que des événements politiques.
Il a aussi donné lieu à toutes sortes de parodies. Nous en avons
utilisé un exemple avec le mystère de l'Erdre (chanson n° 79 en
novembre 2014 ).
D'autres timbres sont bien présents
dans la tradition. Vous retrouverez par exemple dans ce blog :
des airs traditionnels :
Auprès de ma blonde, n° 60
juin 2014 - Au pays de Nantes
C'est la mère Michel, n° 9
juin 2013 – la chanson de Donges
Vous m'entendez bien, n°72
septembre 2014 – les pommes de terre
des extraits de la clé du caveau :
Quand la mer rouge apparut, n°
35 décembre 2013 – Notre bon père Noé
Bonjour mon ami Vincent, n° 61
juillet 2014 - L'arrivée du gaz au Pouliguen
ou des chansons d'auteurs :
Belleville-Ménilmontant,
d'Aristide Bruant, n° 63 juillet 2014 – à Villès-Martin
Monte là dessus... de Borel et
Clerc, n° 28 octobre 2013 – le pont de Pirmil
la fille du bédouin un succès
de Milton, n° 81 novembre 2014 – le garde barrière
D'autres timbres célèbres ont eu la
faveur des auteurs de chansons populaires tels la complainte du juif
errant, la faridondaine, j'ai du bon tabac, Cadet Rousselle...ou la
Marseillaise.
Les chansonniers des siècles
précédents ont largement puisé dans le catalogue de timbres « la
clé du caveau » plusieurs fois réédité et augmenté. Cet
ouvrage recense des milliers d'airs et nécessite malgré tout de
savoir lire la musique. C'est sans doute ce qui explique la
popularité de quelques grands thèmes que tout un chacun avait
entendu fredonner, comme la Paimpolaise.
Notre chanson de la semaine fait
référence à l'actualité de Dastum 44. Il nous était bien
difficile de poursuivre l'autre actualité tant elle dépasse de loin
toutes les horreurs qui peuplent les chansons traditionnelles même
les plus sanglantes. Tout juste peut on oser dire que pour commettre
des actes d'une telle barbarie il faut être complètement...
timbré !
interprète : Jacques Duchêne,
de Mayun, en la Chapelle-des-Marais (44)
source : feuille volante
achetée à Guérande par Mme Constance Crusson, de la Baule –
collectage de Roland Brou.
timbre: la Paimpolaise
Le scandale du blé
A quoi bon cultiver la terre
A quoi bon faire pousser le blé
Puisqu’on on devient déficitaire
Avec du grain plein son grenier
Après la moisson
C’est la déception
C’est encore un nouveau scandale
Qui peine bien des braves gens
Ces louches manœuvres commerciales
Ecœurent tous les bons paysans
Celui qui a les mains calleuses
Fouillant le sol, fauchant l’épi
N’en a pas la vie plus heureuse
Il n’éprouve que du dépit
Pour faire le bonheur
Des spéculateurs
Pendant qu’le cours du blé s’écroule
On peut voir ces beaux gigolos
Qui s’en vont balader leurs poules
A Deauville ou à Monaco
A-t-on besoin d’intermédiaires
Ces types-là, faut les dénicher
Car eux, pour faire leurs bonnes
affaires
Sèment la panique sur les marchés
Ils touchent les gros sous
Sans en fiche un coup
Ils ne courbent jamais l’échine
Mails ils se tapent le bon fricot
Pendant que Jean-Pierre qui turbine
Mange pommes de terre et haricots
Le paysan vend ses denrées
Et son bétail pour presque rien
Mais pour nourrir la maisonnée
On paie deux francs le kilo d’pain
La cot’lette de porc
Coûte son pesant d’or
On peut le dire en toute franchise
Tout le mal vient des mercantis
Si on veut arrêter la crise
Faut jeter tout ça aux orties.
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