Des siècles de rivalité avec les gens
d'outre manche ont laissé des traces dans les chansons
traditionnelles. Si la famille royale est aujourd'hui un des
meilleurs arguments de vente de la presse « people », la
tradition populaire n'a jamais raté une occasion de la brocarder :
batailles navales et suprématie des mers, mariages princiers forcés,
relations amoureuses... C'est justement en buvant à la santé des
amoureux qu'on a pris l'habitude de réserver à la reine
d'Angleterre une expression que notre célébrité locale le général
Cambronne (1) servit sur un plateau à ses troupes.
Maintenant qu'un tunnel a fait d'Albion
une presqu'ile, après des siècles d'isolement, on a tendance à
oublier que notre territoire fut l'objet d'affrontements plutôt
longs où la présence des troupes anglaises sur le continent était
constante. On parlait français à la cour d'Angleterre et une bonne
partie de ces troupes venait de vassaux français ralliés à la
cause, parfois épisodiquement.
Bref, l'intervention de ce souverain
étranger dans une chanson française n'a rien d'étonnant. Le sujet
précis de la discorde l'est un peu plus.
Pour lire la suite et écouter la chanson
Les spéculations sur son origine ne
manquent pas. Certains y voient des allusions à Jeanne d'Arc ;
d'autres la font remonter à la guerre de cent ans ou même à
Richard Cœur de Lion. Aucun fait précis n'est identifiable dans
cette chanson qui a vécu sa vie depuis l'anecdote historique jusqu'à
la ronde enfantine. Elle est connue à peu près partout, avec des
refrains variés :
Diguedon capitaine don, se
retrouve aussi dans la version chantée par Gisèle Gallais (2)
Diguedon tralala ou digue
digue tralala, en Ille et Vilaine, en Brière et dans la
Presqu'ile Guérandaise
Que dit que donc, que dit elle donc,
en Vendée et jusqu'à l'autre bout du pays
La version du Pays de Retz donnée par
Poiraud est plus originale avec j'aime les mariniers sur terre et
sur mer, j'aime les matelots sur terre et sur l'eau.
La principale différence de notre
version avec les autres est qu'ici c'est la belle qui meurt.
Habituellement c'est le roi qui passe de vie à trépas, victime de
la quenouillette, une arme terrible ! Ça ne semble pas
sérieux ; ça l'est encore moins quand le roi finit enterré
dans un champ de pommes de terre !
Et puisque ce combat déséquilibré
tourne à l'avantage de la fille dédaignée, certaines versions en
rajoutent dans le genre guerre pour cours de récréation. Par
exemple :
oh non je ne suis pas mort, j'irai
au bal ce soir
A quel bal iras tu ? Au bal des
demoiselles
Laquelle prendras tu ? Celle
qui m'a fait la guerre
Même pas mal !
Peut être avez vous remarqué que
cette chanson est extraite du
répertoire de Clémentine Jouin, native de Sixt sur Aff (35) mais
résidant à Avessac (44). Ce choix n'est pas étranger à la sortie
prochaine du CD 'Clémentine Jouin, chanteuse du pays de Redon' édité
par Dastum, qui sera présenté en avant-première à la Bogue le
dimanche 25 octobre.
Notes
1 – le héros involontaire de
Waterloo est originaire de Saint Sébastien sur Loire.
Particularité : finit ses jours marié à une anglaise.
2 – Gisèle Gallais – répertoire
d'une chanteuse de Haute Bretagne – édité par Dastum et les
Presses Universitaires de Rennes en 2014
Source : Clémentine Jouin,
d'Avessac, collectée par Mathieu Hamon
interprète : Daniel Lehuédé
catalogue P. Coirault : La
bergère et le roi d’Angleterre (Bergères et rois - N° 03809)
catalogue C. Laforte : Les
trois filles et le roi d’Angleterre (I, C-01)
Au pied d’un lilas blanc
Au pied d'un lilas blanc y'avait une
fontaine
Diguedon, capitaine don
Au pied d'un lilas blanc y'avait une
fontaine
Où allaient s'y mirer trois jolies
demoiselles
Diguedon, capitaine don…
Un jour vint à passer le p’tit roi
d'Angleterre…
Il en salua deux mais laissa la
troisième…
Pourquoi m’salues-tu pas, moi qui
suis la plus vieille…
Je ne te salue pas parce que tu es
fidèle…
Si tu n'étais point roi je t'y ferais
la guerre…
Même que je suis roi, fais-me-la donc
quand même…
Alors prends ton épée et moi ma
quenouillère…
Au premier coup d'épée, la belle
tomba morte…
Où l'enterrerons nous, dit le roi
d'Angleterre…
Au pied d'un lilas blanc, au jardin de
son père…
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