Le répertoire des chansons d'amour comporte un nombre important de chansons de rupture. C'est que tout ne va pas toujours pour le mieux dans la relation amoureuse. A qui la faute ? Certaines chansons nous affirment régulièrement que les garçons sont trompeurs et caressent plus volontiers la bouteille que leur amie. D'autres prétendent au contraire que les filles sont volages et changent d'amant comme d'avis. Tout dépend du point de vue dans lequel on se place. Cette semaine c'est celui d'une jeune fille écœurée de l'attitude de son ex que nous vous proposons.
Pour écouter la chanson et lire la suite :
La chanson de l'amant perdu n'essaye même pas de faire rimer amour avec toujours. La belle nous avoue d'emblée qu'elle n'avait pas qu'un amant. Mais le dépit d'être abandonnée par son préféré semble l'avoir dégouté des hommes. Jurant, mais un peu tard, qu'on ne l'y reprendrait plus, elle en profite pour mettre tous les galants dans le même sac. Cette disposition d'esprit n'est peut-être que provisoire, mais en attendant, elle a sa fierté. Pas question d'admettre qu'elle s'est fait larguer. Elle veut qu'on sache que c'est elle qui a choisi la séparation. Les motifs n'ont rien d'original. Ce sont ceux qu'on retrouve dans la plupart des chansons : le garçon est un coureur de filles et, de plus, passe son temps à boire. Dans ces conditions elle tient aussi à proclamer que ce n'est pas une grosse perte. Avis à celles qui voudraient tenter l'expérience !
Voici une chanson que Patrice Coirault aurait pu classer dans la catégorie des « belles saboulées » au chapitre « dissensions ». Mais le célèbre folkloriste n'a pas retenu cette chanson type dans son répertoire des chansons françaises de tradition orale. Peut-être n'a-t-elle pas été suffisamment repérée dans les ouvrages qui ont servi à l'établissement de cet inventaire. Tout juste peut-on lui trouver une certaine analogie avec d'autres chansons de cette catégorie.
Comme nous l'avons déjà souligné l'intérêt d'exhumer de recueils anciens des pièces de ce genre c'est de noter une évolution du répertoire traditionnel. Ce n'est pas la première fois que le cahier du ménétrier Poiraud nous en offre un exemple. Le répertoire qu'il contient était en vogue dans le Pays de Retz et plus particulièrement dans le secteur de Pornic voici à peu près 170 ans. Si certaines pièces nous sont parvenues intactes jusqu'à aujourd'hui, trouvant place dans les collectes les plus récentes, d'autres ont disparu de la circulation. Plusieurs raisons peuvent être invoquées. Des chansons liées à la danse en rond qui a cessé d'être pratiquée par endroits ; des chansons qui n'ont pu survivre via le répertoire pour enfants dans lequel bien des textes folkloriques sont cantonnés depuis la fin du 19è siècle. Il faut bien avouer que celle ci peut difficilement être versée dans le répertoire enfantin. Ses propos sont trop crus.
Bref, nous ne résoudrons pas ce problème aujourd'hui. Profitons en pour revenir sur le terme « saboulé » si cher à Coirault. Tout comme ces chansons particulières ce mot a perdu son usage dans la langue contemporaine. Synonyme de « tourmenter, houspiller, réprimander, tancer avec véhémence » il correspond bien aux disputes entre amoureux et à leurs conséquences. Déjà, à l'époque où Coirault établissait son catalogage des chansons, le mot n'était plus d'un usage populaire. Son origine (1) viendrait « d'un jeu d'enfants dans lequel celui qui avait fait une faute était frappé avec une peau d'anguille remplie de sable ». Encore une anguille !
note
1 – d'après la définition du dictionnaire encyclopédique Quillet, édition de 1950.
interprètes : Armelle Petit, avec Liliane Berthe et Christine Dufourmantelle
source : Quatre vingt chansons du Pays de Retz, cahier du violoneux Poiraud, (fin 19è siècle) compilé par Michel Gautier
catalogue P. Coirault : non cataloguée
1) J’ai vu que j’avais tant d’amants, mais à présent, je n’en ai plus. ( bis)
Mais à présent, je n’en ai plus.
Car celui que j’aimais le mieux, est celui que je hais le plus.
Amants qui m’avez donné peine, ma foi vous ne m’en donnerez plus. ( bis )
2) Car celui que j’aimais le mieux est celui que je hais le plus. ( bis )
Est celui que je hais le plus.
Il s’en va dire à tout le monde que de moi il n’a pas voulu.
Amants ...
3) Il s’en va dire ...
Je peux prouver tout le contraire. C’est moi qui n’en ai pas voulu.
Amants ...
4) Je peux prouver ...
Il fait l’amour à toutes les filles, à la bouteille encore plus.
Amants ...
5) Il fait l’amour ...
Je peux vous assurer, mesdames, que je n’ai pas beaucoup perdu.
Amants ...
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