Si nous en choisissons une seconde version ce n'est pas
pour le plaisir de jouer au jeu des 7 différences. C'est qu'il y a
encore beaucoup à découvrir avec cette chanson, plus intéressante
qu'elle ne paraît au premier abord.
Pour écouter la chanson et lire la suite
Cette affaire de dénicheur est connue essentiellement
avec trois types de refrains. Notre précédente publication avait
mis en valeur l'alternance : belle voici votre ami, belle
voici votre amant, répondant à deux assonances alternées. Les
textes canadiens, qui ont souvent été repris et enregistrés même
par ici, utilisent souvent le refrain :
Au chant de l'alouette je veille je dors
J'écoute l'alouette puis je m'endors
Et, puisqu'il est question de s'endormir, c'est à
Jeannette (ou Nanette) que les refrains les plus courants posent la
question. Cette formule est très fréquente dans les collectes qui
ont été réalisées dans notre secteur, et ailleurs aussi.
Ce n'est pas la seule chanson où interviennent la
Caille, la Perdrix et l'Alouette. Ces volatiles ne sont pas là pour
donner une leçon de morale aux petits enfants. Leur présence dans
les chansons a plus souvent trait aux relations amoureuses. Ce qui
n'empêche pas certains chanteurs entendus dans notre région ou
ailleurs de répondre à la supplique :
rentourne toi au village, laisse là mes petits
en nous gratifiant de commentaires du style :
Dieu ne veut pas, c'est sage, qu'on touche aux nids
(2)
ou d'une conclusion plutôt rare :
Ému de ce langage, je les remis (2)
La grande majorité de ces chansons présente une
voleuse de nids, même si dans la réalité ce sont sans doute plutôt
les jeunes garçons qui se livrent à ce genre d'acrobaties. S'il y a
inversion des rôles c'est probablement que la chanson a autre chose
à nous dire qu'une défense de s'en prendre aux petits oiseaux. Le
texte présent, comme beaucoup d'autres, dit : je ne suis
point fillette, j'ai un mari. Des versions recueillies
outre-Atlantique sont connues avec le vers : elle me dit
pucelle retire toi d'ici et quelques versions précisent :
Cesse donc d'être fille, prends un mari. En fait de morale
faudrait-il donc comprendre que cette chanson est une invitation à
cesser de papillonner pour établir une relation sérieuse ?
D'ailleurs la voleuse de nids s'empresse de présenter
pour sa défense un mari, sur lequel elle ne dit pas grand chose, et
une progéniture qui nous vaut quelques détails intéressants.
De nos jours il n'est pas rare d'entendre une mère de
famille parler de ses enfants installés à l'autre bout de la
France, ou du monde. A l'époque où cette chanson a pris naissance
(3) c'était surement moins fréquent. Cette insistance est-elle le
signe d'une certaine réussite sociale ? Le dernier vers
renforce cette hypothèse. Le voilà promu à de hautes fonctions ou,
à tout le moins doté d'une distinction réservée aux homme de
valeur d'un point de vue social (4).
Vous aurez remarqué que les enfants se sont installés
dans des villes renommées. Si notre chauvinisme habituel se réjouit
du choix de Nantes, force est de remarquer que les cités choisies
sont celles les plus présentes dans les chansons traditionnelles
(5). Outre, Paris, Nantes et la Rochelle d'autres versions envoient
les enfants à Bordeaux, Rouen...ou Versailles.
Notes
1 – chanson n° 5 de ce blog, en mai 2013 – Enfant
petit – également présente sur notre CD Chants à la marche en
Loire-Atlantique.
2 – d'après une chanteuse de Bourgneuf en Retz notée
par Abel Soreau pour le premier et d'après une chanteuse du Pays de
Chateaubriant reprise par Francis Lemaitre, pour le second
3 – Quelle époque ? C'est difficile à définir.
Quelque part entre jadis et autrefois !
4 – La croix de Saint-Louis est une distinction
honorifique créée par Louis XIV en 1693 pour récompenser les
officiers catholiques les plus valeureux ayant au moins 10 ans de
présence au sein des régiments du royaume, quelle que soit leur
condition de naissance (d'après Wikipedia)
5 - d'après nos recherches, dans l'ordre : Paris,
Nantes, Bordeaux, La Rochelle, Lyon...
Interprètes : Annick Mousset, Isabelle
Maillocheau, Aurélie Aoustin, Béatrice Denoue
source : d’après un assemblage de deux
des versions publiées dans l’édition critique des archives
d’Armand Guéraud : la première recueillie à Pornic (44) et
la seconde à Bouguenais (44).
Catalogue P. Coirault : La belle qui trouve
le nid de l'alouette (Lyriques - N° 00107)
catalogue C. Laforte : I, I-8, la fille et
la caille
REFRAIN
T'endors-tu, Jeannette, oh, oh, oh, oh !
T'endors-tu, Jeannette, oh, que nenni !
Quand j'étais chez mon père, enfant petit (bis)
Il m'envoya aux landes, chercher des nids
Il m'envoya aux landes, chercher des nids (bis)
J'en trouvai un de caille, deux de perdrix
Etc
Quand j'étais chez mon père, enfant petit
Il m'envoya aux landes, chercher des nids
J'en trouvai un de caille, deux de perdrix
Et l'autre d'alouette, le plus joli
L'oiseau qu'est sur la branche, qui m'avisit
Dans son joli langage, elle m'a dit
Que fais-tu là, fillette, tu prends mon nid
Je ne suis point fillette, j'ai un mari
J'ai trois garçons sur terre qui sont de lui
L'un est à La Rochelle, l'autre à Paris
Et l'autre, il est à Nantes, quand r’viendra-t-il ?
Il sera roi de France, Croix de Saint-Louis
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