« Qui a
composé la chanson... » ; cette formule présente dans
les derniers couplets de certaines chansons traditionnelles ne nous
apprend généralement rien de plus que : c'est un garçon, un
soldat, un compagnon...Derrière cet anonymat, il y a pourtant un
parolier à l'origine de chaque chanson ; Le propre de la
transmission orale au cours des siècles c'est de voir cette origine
s'effacer devant la culture populaire, chacun s'appropriant texte et
musiques pour aboutir à ce fonds commun que nous essayons de
valoriser.
Bien sur, il y a des
exceptions. Il existe dans le répertoire bon nombre de textes dont
l'auteur peut être assez facilement identifié. C'est le cas pour la
chanson que nous vous proposons cette semaine, dont le compositeur a
préféré tirer une certaine satisfaction de voir un de ses textes
accéder au statut de chanson « trad. »
pour écouter la
chanson et lire la suite :
Avant de vous livrer
son nom, nous allons essayer de classer par ordre chronologique ces
oubliés de la chanson. Nous passerons rapidement sur la quantité de
textes diffusés anonymement (pas toujours) sur des feuilles
volantes. Un certain nombre des chansons enregistrées pour ce blog
(1) ont été diffusées de cette manière. Pour simplifier,
définissons trois périodes historiques aux contours volontairement
flous :
1
– Jadis – vaguement synonyme d'un « autrefois » hors
de portée de nos souvenirs.
Dans cette vaste
période ce sont des lettrés, en capacité de mettre par écrit
leurs inventions. Rappelez vous que tout récemment nous avons
retrouvé, dans un cahier de chansons, une composition d'un poète du
18ème siècle, F.G. Léonard. Parmi ces lettrés des siècles passés
figurent aussi des ecclésiastiques. Ce fut le cas de François
Gusteau, curé de Doix (85) au 18ème siècle, à qui on
doit un certain nombre de chansons, noëls et même œuvres engagées.
Voyez par exemple la chanson n°49 de ce blog (mars 2014). En
Loire-Atlantique, François Tuard, curé de Saillé, au début du
20ème siècle, a publié plusieurs recueils de ses
chansons que nous avons parfois retrouvées dans les collectes. Par
exemple : La prise de tabac (n°153 – mai 2016 )
2
– Au siècle dernier – Cette fois c'est plus clair, vos grands
parents en sont des témoins directs.
Les auteurs d'avant
guerre (celle de 14) ont été repris via les cahiers de chansons
soigneusement recopiés par des soldats, des écoliers, des
ménagères...soucieux de noter leur répertoire. Le plus connu et le
plus prolifique est sans doute Théodore Botrel. Catalogué comme
barde, chanteur campagnard, lui dont la carrière doit tant à Paris,
il n'est pas seulement célèbre pour sa Paimpolaise. Auteur de
centaines de chansons dont certaines ont acquis un statut particulier
auprès du peuple parce que composées dans un style et une ambiance
propre aux chants traditionnels qu'il connaissait fort bien. Outre le
timbre de la Paimpolaise, vous pouvez le retrouver avec la goélette
(n°114 – juillet 2015).
3
– De nos jours – période en cours, qui débute avec votre
naissance et donc variable en fonction de votre âge.
Dans la scène
actuelle certains interprètes de chansons « folk » se
sont essayés à la composition dans cette veine. Mais leurs œuvres
n'ont ni l'ancienneté ni une diffusion suffisante pour être tout a
fait passées dans le répertoire. Cela ne les empêche pas d'être
de qualité et tout aussi agréables à chanter. Tous ces auteurs ont
revendiqué la paternité leurs œuvres avant que des chanteurs les
reprennent en oubliant leur origine. La démarche est assez
différente avec la chanson de cette semaine « Derrière chez
nous y'a-t'une lande ». Elle a été enregistrée en 1973 sur
un 33 tours intitulé « Pré-Folk » la préhistoire du
folk / chansons à répondre. Elle y est interprétée par Naïk
Raviart, Mône Dufour, Jean-François Dutertre et Yvon Guilcher, ce
dernier en étant l'auteur (2). Popularisée par ce disque mais aussi
par des stages de chant, elle a fini par trouver sa place dans le
répertoire de groupes comme le Cercle des paludiers de Saillé, un
village qui a décidément une place à part dans la chanson
populaire ! Fernand Guériff l'avait notée et incluse dans le
tome 4 de ses collectes consacré en particulier aux danses du pays
guérandais (3). Voilà comment des paroles fort bien arrangées,
dans l'esprit du folklore, peuvent accéder au rang de chanson
traditionnelle. Encore une fois ce n'est pas faire insulte a son
auteur qui se satisfait très bien de voir une de ses œuvres
acquérir ainsi la popularité.
Notons au passage
qu'après un enregistrement en 1973 comme « rond de Guérande »
la chanson a poursuivi sa vie comme rond d'Argenton. C'est ainsi
qu'elle est notée dans le Livre des chansons à danser,
publié par l'ADP (4) en 1986, nous confirmant qu'Yvon Guilcher en
est bien l'auteur.
notes
1 – trop
nombreuses pour qu'on les liste toutes
2 – Y. Guilcher
est l'auteur d'un livre sur la danse traditionnelle en France, publié
en 1998. Il était l'un des trois piliers du groupe folk Mélusine
dans les années 80. Son père, J.M. Guilcher a publié de nombreux
ouvrages sur la danse et les chansons traditionnelles.
3 - dernier des
volumes de la série, publié par Dastum 44 et toujours disponible
pour la modique somme de 25€
4 – L'atelier de
la danse populaire (ADP) a publié Le livre des chansons à danser en
1986 dans une série intitulée la recherche en danse. L'ouvrage
contient 130 chansons à danser, traditionnelles ou « adaptées ».
interprètes :
Isabelle Maillocheau et Françoise Bourse
source :
Y. Guilcher, via le Cercle des paludiers de Saillé et Fernand
Guériff
Non cataloguée
1-)
Derrièr' chez nous
y a t'un' grand' lande, À la reversée du pré ( bis)
Ell' fleurit quand
on la commande, En ce joli moi-ois de mai.
Refrain :
Donn' ton p'tit
coeur, fille charmante, Ton p'tit coeur est en-en danger
2-)
Ell' fleurit quand
on la commande, En ce joli mois de mai ( bis)
Tous les oiseaux du
bout du monde, En chantant, vienn't s'y poser.
3-) ......
N' y a que ma tant
jolie maîtresse, Qui refuse d'y aller.
4-) ......
Je la prendrai par
sa main blanche, Pour la mener à danser
5-) ......
Quand ell' sera
dessus ces landes : Belle voulez-vous m'aimer ?
Paroles non reproduites par F. Guériff:
Comment
voulez vous que je vous aime
On
dit que vous êtes marié
En
promettant d'être fidèle
Devant
l'maire et le curé
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire