Le déserteur qu'on s'apprête à
pendre est un thème que nous avons déjà traité dans ce blog.
Après avoir écouté celle ci vous pourrez comparer avec la chanson
n° 50 qui raconte la même histoire. Malgré la gravité du sujet,
c'est en chanson à danser qu'il est traité ici. Ce bal paludier
vient du répertoire de Mme Crusson, que nous avons déjà utilisé à
plusieurs reprises. Roland Brou, qui l'a collectée, a lui même
enregistré cette ronde sur le CD chants à danser en presqu'ile
guérandaise (1).
Nous ne reviendrons pas sur le fond de
l'histoire, pour nous arrêter sur quelques détails. Enfin,
« détails » c'est vite dit, puisqu'il s'agit du sort du
déserteur. Une autre curiosité de cette chanson c'est sa
localisation, Constance Crusson nous ayant situé l'action dans la
ville d'Alger.
Pour écouter la chanson et lire la suite:
Pourquoi Alger, quand la plupart des
versions nous présentent les trois soldats comme des dragons du
régiment d'Angers ? Facile, nous direz vous, Alger – Angers,
phonétiquement ça se ressemble. Parce qu'à part cette ressemblance
on voit mal l'action se dérouler dans la casbah d'Angers sur le bord
de l'oued Maine. Donc ce texte se caractérise par une alternance de
rimes féminines et masculines avec des assonances en « é ».
Ce qui nous vaut dans d'autres versions l'intervention du roi, qui se
prononçait alors « roué ». Voilà un indice d'une
chanson assez ancienne.
C'est donc le plus souvent en Maine et
Loire que ces soldats ont déserté, sont incarcérés ou vont être
pendus. Plus rarement ils viennent d'un régiment des Flandres, ou
bien on les envoie se faire juger et pendre à Rennes. Mais la
chanson traditionnelle étant une matière vivante, les conquêtes
coloniales de la France au 19ème siècle ont fort bien pu inciter
un(e) interprète à en modifier les circonstances. Mme Crusson
tenait son répertoire de la tradition familiale, mais il n'est plus
possible aujourd'hui de savoir si elle connaissait l'origine de cette
version.
L'autre sujet de préoccupation dans
cette chanson c'est de savoir si elle finit bien ou non. On nous dit
qu'ils ont été jugés à pendre ou à tuer. Mais on ne nous dit pas
tout. Une fois sur deux cette chanson offre un dénouement heureux.
Ce n'est pas le cas ici ni dans la version notée et enregistrée par
Albert Poulain près de Redon. De même, dans son roman les filles du
feu, Gérard de Nerval la cite en déduisant que le déserteur n'a
pas bien fini.
Pourtant il existe d'autres
possibilités qu'on retrouve par exemple dans la version que nous
avions précédemment publiée :
Tiens, le roy te fait grâce et
voici ton congé (bis)
Ta mie, à Guémené, va-t’en vite
l’épouser.
chanson collectée par Abel Soreau à
Guémené-Penfao.
Encore plus optimiste, le texte publié
par Tarbé dans son romancero de Champagne :
...Nous voilà condamnés faisons un
bon diner
boire un coup à la santé du roi
et pour finir le roi le roi leur a
pardonné !
Notes
1 – ne le cherchez pas dans nos
éditions ; le stock est définitivement épuisé.
interprète : Xavier Venet
avec Roland Guillou et Jean-Louis Auneau
source : Constance Crusson,
de La Baule, collectée par Roland Brou en juin 1995
catalogue P. Coirault : Le
déserteur que l’on s’apprête à pendre (Déserteurs - N°
06805)
catalogue C. Laforte : Le
déserteur pendu (1-B–19)
C’étaient trois jeunes soldats
Du régiment d’Alger (bis)
Pour l’amour d’une brune, tous
trois ont déserté
Gai falira lalalire, gai falira dondé
Pour l’amour d’une brune
Tous trois ont déserté (bis)
Dans leur chemin rencontrent trois
beaux gendarmes à pieds
Gai falira lalalire, gai falira dondé
…Leur ont d’mandé : soldats, où
est-y votre congé…
…Notre congé, dirent-ils, il est
d’sous nos souliers…
…Les ont pris, les emmènent dans les
prisons d’Alger…
…Ils furent jugés à pendre, à
pendre ou à tuer…
…Voilà le triste sort des soldats
désertés.
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