vendredi 2 août 2013

15 - Le départ de Napoléon


On ne dira jamais assez la richesse du répertoire contenu dans les cinq volumes de chansons de la presqu'ile guérandaise compilées par Fernand Guériff. De la chanson à dizaine aux grandes complaintes en passant par la chanson historique, comme celle de cette semaine.
Le départ de Napoléon n'a pas été collecté directement par Guériff. Il provient du fonds de 200 chansons notées autour de 1860 par Gustave Clétiez, musicien (organiste) et compositeur de Guérande. Cette chanson figure page 314 du tome 3, dans un chapitre consacré aux souvenirs napoléoniens dans la chanson. Mais laissons la parole à l'auteur : « La collection de Gustave Clétiez contient quatre curieuses chansons, répandues chez nous par colportage, sur l'époque napoléonienne. Ce sont donc des œuvres relativement récentes. Leur cycle a été court, mais elles avaient tout de même pris racine puisqu'on les chantait vers 1860. Le souvenir de Napoléon a persisté longtemps dans le peuple après Waterloo. »
Dans la période difficile de la restauration, le culte entretenu par les partis bonapartistes, et porté par d'anciens soldats de la grande armée, trouvait un écho dans notre région. « C'est ainsi qu'à Saint Nazaire, un quartier de la ville s'appelle le petit caporal. En 1850 il y avait en cet endroit une très modeste auberge coiffée de tuile avec, au dessus de la porte, un panneau représentant l'empereur peint sur toile.
C'est sous forme de complaintes qu'on montrait le triste sort de Napoléon 1er pour apitoyer les populations, ou qu'on chantait certains faits légendaires pour exalter sa bonté, sa justice. »
Ces chansons sont devenues rares. Guériff en cite juste une autre version trouvée en Berry.
pour écouter la chanson et lire la suite

LE DEPART DE NAPOLEON

Partons, mes officiers, partons
Il est temps de nous mettre en route
Partons, mes soldats de valeur
Je ne suis plus votre empereur
 
Du temps que j’étais empereur
Du temps que j’gouvernais la France
J’la gouvernais avec douceur
La France était bien florissante
A présent que je suis parti
On voit la France dépérir
 
Quand j’ai perdu Montebello (1)
Grand dieu que j’ai versé de larmes
Quand j’ai perdu Montebello
Le meilleur de mes généraux
 
C’est un Normand matelot (2)
Qui a livré, livré la France
Il l’a livrée à l’ennemi
Comme les juifs pour Jésus Christ
 
Joséphine m’avait toujours dit
En f’sant cette malheureuse campagne
D’être trop ambitionneuse
Un jour j’en d’viendrai malheureuse
 
Ils m’ont pris, ils m’ont emmené
Tout droit dans l’île de Sainte-Hélène
En un pays bien éloigné
Dont jamais je ne reviendrai
Et de mon fils ayez bien soin
Un jour il sera votre soutien
 
Adieu Paris, adieu Strasbourg
Adieu la charmante capitale
Adieu Paris, adieu Strasbourg
Nous ne nous verrons plus ce jour.
 
(1) Le Maréchal de Lannes, Duc de Montebello
(2) déformation de « C'est un nommé Berthelot »
 
source : collectage à Guérande de Gustave Clétiez (1830-1896) repris par Fernand Guériff (1914-1994)
interprète : Martine Lehuédé
 
Si les souvenirs nostalgiques de l'empire vous agacent, vous pourrez toujours vous venger avec les comptines de courr de récréation :
Napoléon est mort à Ste Hélène, son fils Léon lui a crevé le bedon...
ou encore :
Na-po-lé-on 1er descend les escalier - Demande à son guichet où sont les cabinets?
Le guichet lui répond, espèce de cornichon - Quand on est caporal, on chie dans le canal!...
Aucune des deux ne figure dans les enfantines notées dans le tome IV (cf. rubrique éditions). Mais encore une fois, le répertoire publié par Fernad Guériff, on finit toujours par y revenir !