Cette fois ça y est. Les agapes,
festivités, réjouissances...et leurs lendemains qui déchantent,
sont derrière nous. Il est temps de se remettre au travail. Cette
semaine nous coupons les fifondes.
Ne vous précipez pas sur le
dictionnaire, vous avez peu de chances d'y trouver le mot ; sauf
si votre édition est consacrée au langage briéron. Les fifondes,
ou fifandes, désignent une sorte de jonc qui servait à rempailler
les chaises. Cette matière première étant omniprésente dans le
marais de brière, l'économie locale a donné, outre des coupeurs de
fifondes, des vanniers et des chaumeurs(1) réputés.
Seul le refrain nous indique le
caractère local de la chanson. Le texte lui même se rattache à un
thème connu : celui du prince d'Orange qui revient de guerre
blessé « de trois coups de lance qu'un anglais lui a donné ».
L'origine de cette chanson remonterait donc aux guerres contre
Charles Quint.
écouter la chanson et lire la suite
Hélas il reste peu de survivants de
cette époque pour nous conter l'histoire dans ses détails. Les
historiens eux mêmes hésitent sur une période qui va de 1507 à
1544 ! Le beau prince était-il aussi vertueux que le prétend
la chanson. Les versions collectées dans le pays de Retz (2) ou à
Herbignac, par Hervé Dréan (3) ne s'étendent pas sur le sujet :
la belle Hélène était consentante. Notre chanson, apprise en
Brière par Fernand Guériff de M. Aoustin, s'inquiète tout de même
des conséquences. Un « heureux » événement est
attendu. Plus étrange est la version collectée au Québec par
Marius Barbeau (4). Le prince n'y admet qu'une aventure avec une
brunette « encor' j'ai bien payé cinq cent liards, autant de
sous marqués ». Belle mentalité !
S'agit-il d'un chant de travail ?
Un blues briéron ? Le rythme suggère plutot une utilisation en
chant à la marche ou en bal. Quoi qu'il en soit méfiez vous du
refrain si vous avez un cheveu sur la langue.
Falut, et à la femaine profaine.
Notes :
1- des chômeurs aussi, hélas !
2 – chanson collectée à Pornic,
page 100 dans chants populaires du comté nantais et du bas-Poitou de
Armand Guéraud. éd. Modal/FAMDT
3 – chantée par M. Sébillot à
Herbignac – page 32 vol. 2 – Instants de mémoire – Hervé
Dréan – éd. Musique sauvage
4 – version du bas St Laurent –
page 335 – Le rossignol y chante – Marius Barbeau – éd. Musées
nationaux du Canada
Je
n’irai plus en guerre, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, car je n’ai rien gagné (bis)
J’ai
r’çu trois coups de lance, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, l’un dans le bas côté (bis)
L’autre
m’y porte au cœur, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, c’est celui dont j’mourrai (bis)
Si
vous êtes malade, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, faudra vous confesser (bis)
Pourquoi
m’y confess’rai-je, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, moi qui n’ai pas péché (bis)
Il
n’y a qu’la belle Hélène, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, encore elle le voulait (bis)
Si
c’est un fils qu’elle porte, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, il sera grenadier (bis)
Il
portera les armes, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, que son père a laissées (bis)
Si
c’est une fille qu’elle porte, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, Faudra la marier (bis)
Avec
l’plus beau jeune homme, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, qu’i a dans l’évêché (bis)
Dans
l’évêché de Nantes, coupons les fifondes (bis)
Lonla
matulurique, et dans celui d’Angers (bis).
source :
« chansons de Brière » (Raymond Aoustin) - tome 3 du trésor des chants populaires folkloriques du pays de Guérande : page 108 - édité par Dastum 44 (voir page éditions)
interprète
: Hugo Aribart
catalogue P.
Coirault : Le soldat qui n’a embrassé que celles qui le
voulaient (N° 6606)
catalogue
C. Laforte : Le prince d’Orange (1-C-02) pp
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