Dans la tradition c'est LE pont de
Nantes qui est chanté : un coq y chante, on y fait des
rencontres, on s'y marie, on y danse, on s'y fait prendre et on
s'évade, on s'y noie ...oui mais sur quel pont ? Pour franchir
la Loire au temps jadis il n'y qu'avait qu'un seul passage mais au
moins six ponts sur ce fleuve qui avait autant de bras qu'une déesse
hindoue. André Péron, auteur d'un ouvrage sur les pont de Nantes
(1), donne l'explication : « Jusqu’au IXe siècle, la
Loire se franchissait en barque. À l’époque le fleuve était
beaucoup plus large, avec moins de courant. Un véritable archipel
séparait la ville de Nantes, installée au nord autour de la place
du Bouffay, de la rive sud. Les premiers ponts ont été bâtis en
bois et leurs tabliers étaient recouverts de pierres comme les
chaussées. Sur les îles appelées à l’époque Prairies, les
chaussées étaient construites sur des arches pour être hors d’eau.
Ceux qui les empruntaient avaient donc l’impression d’un seul
pont continu depuis la Poissonnerie jusqu’à pont Rousseau ».
pour écouter la chanson et lire la suite
pour écouter la chanson et lire la suite
Tout au bout de la ligne des ponts,
Pirmil, porte de Nantes, était le seul passage nord / sud depuis
l'estuaire et avant Angers-les Ponts de Cé. Régulièrement détruit
par les crues de la Loire, l’ouvrage de bois puis de pierre était
au cœur d’une activité intense. « Le pont de Pirmil était
le plus important par sa taille mais aussi sa localisation. Tête de
pont, il conditionnait l’accès à la ville de Nantes mais aussi à
la Bretagne pour les voyageurs et marchands du Poitou ».
Le pont de Pirmil est le symbole de la ténacité des nantais pour lutter contre les éléments, et les activités humaines, qui menacent le passage. Au 14ème une forteresse protège ce lieu stratégique. Mais ce sont les crues et le gel qui ont raison du pont par quatre fois au 16ème siècle. Malgré la réalisation d'arches en pierre, les intempéries sont responsables de trois nouveaux effondrements aux 17 et 18ème. Les pêcheries et bateaux-moulins installés près du pont le fragilisent et il faut continuellement le réparer. Au 19ème la consolidation, effectuée en 1851, semble garantir sa solidité. Mais les dragages entrepris pour lutter contre l'ensablement du fleuve aboutissent à un nouvel écroulement en 1924. Et voilà l'origine de notre chanson !, dont l'auteur, anonyme, s'est servi de l'air de “Monte là-dessus... tu verras Montmartre” (musique de Charles Borel-Clerc).
Reconstruit en 1926, détruit par
l'armée allemande en 1944, le pont de Pirmil est resté le seul
passage jusqu'en 1966 et l’achèvement de la deuxième ligne des
ponts. Depuis 1992, après l'ouverture du pont de Cheviré,
son doublement a permis au tram de franchir la Loire.
Pour en savoir plus, outre l'ouvrage
d'A. Péron déjà cité, vous trouverez des informations dans cet
article ou celui ci ainsi que de nombreuses anecdotes dans
les différents ouvrages de Stéphane Pajot. (2)
notes
1 - “Sur les Ponts de Nantes”,
André Péron, éditions Ressac.
2 - « la trilogie nantaise »
Stéphane Pajot, éditions d'Orbestier.
Le pont de Pirmil
Tout au long de la ville au delà de
Vertais
Un monde très tranquille loin du
fleuve habitait
Pour faire un tour à Nantes fallait
passer un pont
Chose vraiment étonnante qui tenait
qu'par des crampons
A ceux de nos édiles qui pouvaient
s'fracasser
On dit vous faites pas d'bile il n'est
pas prêt de casser
Passez dessus, passez dessus, passez
dessus le pont n'est pas fragile
Il se peut qu'il soit vieux il tiendra,
c'qu'on vous dit est sérieux
A ce pont le pompom pour la force et la
qualité d'pile
On peut passer dessus sans tomber dans
le jus
Pour aller en ville
Un soir un garde' champêtre qui sur
l'pont prenait le frais
Crut bientôt reconnaître que ça
sentait mauvais
C'était l'gaz d'éclairage qui sortait
doucement
Empestant l'voisinage depuis un bon
moment
Devant les masses de sable qui
passaient au fil de l'eau
Soit dit un contribuable que ça, ça
fait du bon boulot
Ne' passez plus, ne' passez plus, ne'
passez plus le pont est trop fragile
Vous pourriez, c'est certain, dans la
Loire prendre un bon petit bain
Car ce pont qui se rompt et qui est ma
foi par trop fragile
Ne passez pas dessus vous tomberiez
dans le jus
Pour aller en ville
Habitant l'autre rive je suis tout
désolé
De voir ce qui arrive, je suis tout
attristé
Si je veux faire la fête pendant un
bon moment
Il faut qu'à ma conquête je trouve un
boniment
J'raconte à Eugénie ce que j'ai fait
l'tantôt
Tous les hommes de génie peuvent faire
des ponts de bateaux
Ne' passez plus, ne' passez plus, ne'
passez sur le pont qu'a plus d'pile
Vous pourriez, c'est certain, dans la
Loire prendre un bon petit bain
Car ce pont qui se rompt et qui est ma
foi par trop fragile
Ne passez pas dessus vous tomberiez
dans le jus
Pour aller en ville
Avec tous les frais, faut pas qu'ça
vous effraie
Dans vos billets d'mille
source : chanson recueillie par Raphaël Garcia en avril 1981, auprès de Marie Monier, au Bignon (44)interprétation : Janick Péniguel (chant) Blandine Dousset (accordéon)
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