Cette chanson est connue de longue date
dans tout l'ouest de la France. Elle se rapporte à une des
traditions de la cérémonie du mariage qui consiste à porter la
soupe à l'oignon ou la soupe au lait, à la mariée après la nuit
de noces. Son titre générique est « la chanson des
oreillers ». De nombreuses versions font référence au pont
d'Avignon. Il y est quasiment toujours question de pigeons ramiers.
Trescalan est un village de la commune
de la Turballe. La version interprétée ici y a été collectée dans
les années 40. Vous pouvez en entendre une autre version dans
l'anthologie des musiques traditionnelles publiée en 2009 par les
éditions Frémeaux (1). Elle est interprétée par « Maguesite »
Providence Bouteau, grande chanteuse de l'ile de Noirmoutier. Armand
Guéraud (2) en a publié une version collectée à Bouguenais
(banlieue nantaise). Il cite d'autres versions collectées en
Basse-Bretagne par Duhamel et Bourgault-Ducoudray en Trégor et en
Cornouaille. Ce n'est plus le pont d'Avignon qui sert de cadre à ces
chansons qui sont généralement situées « war bont en
Naoned » (sur le pont de Nantes). Jean-Baptise Weckerlin, dans
son ouvrage sur les chansons populaires de France (3) en donne une
version plus complète, originaire de Normandie. D'autres avatars de
cette chanson ont été notés au Canada, ce qui est bien naturel
puisque les provinces de l'ouest ont majoritairement contribué au
peuplement de ce pays.
Pour lire la suite et écouter la chanson
Pour lire la suite et écouter la chanson
Notre version locale est fragmentaire.
Elle ne fait pas mention du pont d'Avignon. Profitons en pour tordre
le cou à une croyance qui veut qu'on ait dansé sur le pont
d'Avignon. Pas plus que sur le pont de Nantes il n'y a eu de bal sur
le fameux pont Saint Bénézet. Pour comprendre cette confusion
reportez vous à la chanson n° 28 « le pont de Pirmil ».
Le franchissement du Rhône, comme celui de la Loire, se faisait sur
des chaussées surélevées entre ponts et îles. Ces quartiers hors
des villes étaient aussi des lieux de réjouissances et de bals.
D'où, par extension, l'expression danser « sur » le
pont. Merci qui ?
Enfin, vous aurez remarqué qu'on ne
peut quasiment pas passer une semaine sans oiseaux. C'est
Hitchcokien ! Et qu'on ne vienne pas nous dire que c'est par
analogie à la musique. Les navrantes roucoulades des pigeons font
peut être penser à certains chanteurs de variétés mais n'ont
vraiment rien de mélodieux. Ajoutées aux déjections fienteuses
dont ces charmantes bestioles crépissent les murs de nos cités,
elles renforcent l'opinion que leur seule utilité est d'accompagner
les petits pois quand on n'a pas la chance d'avoir mieux. Sales
bêtes !
Notes
1 – France : Une anthologie des
musiques traditionnelles – Frémeaux & associés (avec la
collaboration de Dastum 44)
2 – Chants populaires en Bretagne et
Poitou – recueillis par Armand Guéraud – Modal / FAMDT – tome
2 pages 336-337
3 - J. B. Weckerlin - Chansons
populaires du pays de France, volume II, page 265
4 - Un cheval moreau est de couleur
brun foncé
C’est trois pigeons ramiers
Ouvrez, la porte, ouvrez, mignonne
mariée
Attendez à demain, la fraîche matinée
Pour que mon lit soit fait, ma chambre
balayée
Comment vous attendrais, j’ai la
barbe gelée
La barbe et le menton, la main qui
tient l’épée
Et mon cheval moreau (4) est mort sur
la gelée
C’est trois pigeons ramiers qui ont
pris leur volée
Ils ont volé si haut, la mer ils ont
passée
Sur la tête de la belle, ils ont pris
reposée
Ouvrez la porte, ouvrez, qu’on voie
la mariée
Si vous ne l’ouvrez pas, elle sera
brisée
A grands coups de marteau, à grands
coups de cognée.
source : « chansons de
Trescalan » (Françoise Danet – 1949)
interprète : Nolwenn Le Dissez
catalogue P. Coirault : La
chanson des oreillers (N° 5217)
catalogue C. Laforte : Les
oreillers (1-D-02)
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