Ce ne sera pas tant pour ajouter à nos
remarques précédentes. L'essentiel a déjà été dit. Mais plutôt
pour remarquer qu'au delà des ressemblances entre les nombreuses
versions, cette chanson peut se livrer à différentes
interprétations. De la romance mélancolique nous voilà passé à
un air plus entraînant. Le refrain collecté au 19ème près de La
Baule par Gustave Clétiez, avec ses léridondon léridondaine,
suggère une toute autre utilisation. Que cette mélodie ait pu être
utilisée en chant à la marche ou à danser n'a rien d'étonnant.
D'autres interprétations plus récentes et fort semblables,
collectées entre presqu'ile guérandaise et estuaire de la Vilaine
le confirment.
Hormis des chansons à dizaine aux
paroles spécifiquement adaptées aux cortèges de noces, il n'existe
pas de chants de marche ou de danse par destination, mais le plus
souvent des textes adaptés aux besoins. Telle chanson a fort bien pu
trouver sa place dans les veillées, accompagner les travaux des
couturières ou des laboureurs, rythmer les ronds et les bals, ou
faire passer le temps dans les déplacements à pied. Il a suffit
d'adapter l'air, le refrain, le tempo...
Ces remarques n'ont rien d'une
théorie ; il s'agit juste de constatations. Pour en revenir à
la belle au jardin d'amour, Canteloube en a publié une version
berrichonne qui « ornée de certaine manière, peut même
servir de briolage (1) ». Voilà encore une utilisation
supplémentaire, comme véritable chant de travail.
Pour en finir avec nos amoureux,
Doncieux, dans son analyse de la chanson, note la timidité de
l'amant qui « se plaint, soupire, n'ose approcher ...
cette extrême discrétion ne serait ce point justement là le secret
des mélancolies de la belle ? ». Nous terminons sur cette
interrogation un sujet qui reste inépuisable.
A vous d'interpréter...dans tous les sens du terme
A vous d'interpréter...dans tous les sens du terme
La belle au jardin d’amour
La belle [est] va t’au jardin d’amour
(bis)
C’est pour y passer la semaine,
léridondon léridondaine
Son père la cherche partout (bis)
Et son amant qui est en peine,
léridondon léridondaine…
N’as-tu pas vu passer ici / Ma mie,
ma mie, la beauté même
Elle est là-bas dans ces vallons /
Assise au bord d’une fontaine
Un bel oiseau dedans sa main / Elle lui
raconte toutes ses peines
O bel oiseau, tu es heureux / D’être
entre les mains de la belle
Et moi qui suis son bien-aimé / Je ne
peux pas m’approcher d’elle.
source : « chansons
d’Escoublac » (version recueillie par G. Clétiez en 1860)
interprète : Jean-Louis
Auneau
catalogue P. Coirault : La
belle au jardin d’amour (N° 1801)
catalogue C. Laforte : La belle au
jardin d’amour (1-G-15)