vendredi 3 novembre 2017

222 - Là-haut sur la montagne

Chanson d'amour, chanson à boire ou combinaison des deux ? Voici à nouveau un texte qui mélange les genres. S'il est difficile de se prononcer d'une manière définitive c'est que le choix de l'interprétation et les circonstances peuvent en faire tantôt un refrain de libations tantôt une complainte amoureuse.
Nous l'avons incluse dans notre CD « chants des plaisirs de la table » (1) parce qu'elle se prête bien à cette utilisation autour d'un verre en comparant les plaisirs de l'amour et ceux de la boisson. Le dosage des deux varie d'une version à l'autre de cette chanson. Aux couplets qui utilisent des métaphores bucoliques à base de moutons, de papillons ou d'abeilles, viennent s'ajouter d'autres bâtis sur le même principe, à la gloire du vin.
Pour écouter la chanson et lire la suite :


La comparaison entre l'amour des femmes et le goût pour la bouteille est présente dans bien des chansons. Cela va parfois jusqu'à dire que l'une est une amie plus fidèle que l'autre. Point de cela dans ce texte qui met à égalité les relations amoureuses et la boisson. Aimer et boire ne sont pas des crimes. Si la référence à Dieu est insistante c'est que la religion a souvent fait, elle aussi, le parallèle, en considérant l'amour et la boisson comme des sources de péché.
Plaisirs de la chair et de la chère sont donc traités sur le même plan, avec une façon très adroite de balayer les critiques moralisatrices et les excès de l'abstinence et de la tempérance. Un hymne à la bonne vie, en quelque sorte, qui explique sans doute la popularité de cette chanson.
Ce texte présente un nombre de couplets variables d'une version ou d'un interprète à l'autre. Cela donne parfois des juxtapositions étonnantes. Ainsi après nous avoir vanté des plaisirs simples et détachés de tout matérialisme, le sixième couplet réclame ironiquement de l'argent en abondance.
L'expression il aurait mis les vignes en mer a de quoi surprendre. Certes, les franges littorales donnent rarement de grands crus mais l'idée de noyer la vigne sous la mer pour empêcher de produire du vin est totalement saugrenue. Elle vient en fait d'une déformation du texte qu'on retrouve parfois chez d'autres interprètes. La formulation originale est :
Il aurait fait la vigne amère
s'il eut voulu qu'on en but pas,
ce qui est plus logique.
C'est à Antoinette Perrouin, chanteuse de Couffé dans le pays d'Ancenis que nous devons cette version de la chanson, via la collecte de Pierre Guillard. Nous vous donnons deux couplets bonus (en italique dans le texte). Il viennent d'un autre chanteur du même secteur et de la même famille qu'Antoinette Perrouin, M. Joseph Rousseau, de Ligné, enregistré en 1967 par Jean Renaud. Ce couplet renforce encore la comparaison entre la femme et la bouteille.

Note
1 – deux ans déjà que ce disque est paru ! Il n'est pas trop tard pour vous le procurer (voir page « nos éditions »)

Interprète : Barberine Blaise
source : Antoinette Perrouin, enregistrée par Pierre Guillard et Patrick Bardoul aux Mazeries, en Couffé
catalogue P. Coirault : Aimer n’est pas un crime (Petites scènes, N° 01516)
catalogue C. Laforte : Là-haut sur ces montagnes (2-F–05)

Là-haut sur la montagne
J’ai entendu pleurer
Ah, c’est la voix de ma compagne
Je m’en vais vite la consoler

Qu’avez, qu’avez la belle
Qu’avez-vous à pleurer
Ah, si je pleure, si je soupire
C’est de regret d’avoir aimé

Trop aimer n’est pas crime
Dieu ne le défend pas
Il aurait fait des cœurs de pierre
S’il eut voulu qu’on aimât pas

Les moutons dans la plaine
Sont en danger du loup
Et toi et moi, gentille bergère
Nous sommes en danger de l’amour

Les moutons vivent d’herbe
Et l’abeille de fleurs
Et toi et moi, gentille bergère
Nous ne vivons que de langueur

Il y a trois choses en France
Que Dieu ne défend pas
C’est de l’argent en abondance
Une jolie femme et du bon vin

Boire un coup n'est pas crime
Dieu ne le défend pas
Il aurait mis les vignes en mer
S'il eut voulu qu'on n'buva pas

Ni or, ni argent, ni paix sereine
Une femme et du bon vin
De ce vin blanc qui brille au verre
Et fais les hommes sans chagrin.

A ta santé mignonne
Prends ton verre à la main
Et moi j'y prendrai la bouteille
Et je t'y verserai du vin.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire