vendredi 15 septembre 2017

215 - Le piocheur de terre

Pour fêter la sortie du double CD consacré au pays de Châteaubriant nous avons choisi cette semaine une chanson dont l'original a été retenu dans ce quatrième ouvrage de la collection « pays de Bretagne ». Elle raconte les amours contrariées de deux jeunes gens de condition très modeste : le garçon est un terrassier (piocheur de terre) soumis aux aléas de la conjoncture entre la fin d'un chantier routier et l'arrivée, heureuse, du chemin de fer. La jeune fille est une lingère, autrement dit une « petite main » qui ravaude les vêtements. Ces deux professions, tout en bas de l'échelle sociale, n'ont pas survécu à l'évolution de la société de consommation...et à l'invention de la pelleteuse mécanique.
pour écouter la chanson et lire la suite :



Plusieurs versions de cette chanson ont été recueillies en Haute-Bretagne, principalement dans le pays de Redon. A l'origine il semble bien que le prétendant de la jeune fille était un militaire (chasseur, artilleur, cavalier...) et que la raison de son éloignement était la déclaration de guerre. Quelques versions, dont celle ci, en font un mineur, terrassier ou un piocheur de terre. La raison du départ est cette fois l'arrêt des travaux et l'ouverture d'un autre chantier.
Les archives fournissent de nombreux exemples d'un tout autre début pour cette chanson qui ajoute pour premier couplet :
J'ai fait l'amour cinq à six mois
Dans la ville de Rennes
Oui je l'ai fait selon la loi
Mon cher amant auprès de moi
sur le bord de la rivière (ou d'une fontaine)
C'est ainsi que l'interprète Clémentine Jouin, d'Avessac, que vous pouvez entendre sur le CD qui lui a été consacré dans la collection « grands interprètes de Bretagne » (Dastum – 2015)
La phrase qui termine chaque couplet - tout le long du chemin de fer - fait penser à une autre chanson où une jeune fille a quitté sa famille pour suivre trois jolis mineurs du chemin de fer. Nous l'avons déjà publiée et analysée dans ce blog (chanson n° 57 en mai 2014). Cela ne nous renseigne pas pour autant sur l'ancienneté de ce texte qui prouve que les chansons traditionnelles ont la capacité de s'adapter aux situations.
L'histoire de Châteaubriant est depuis longtemps liée au chemin de fer. La réparation ferroviaire fut une de ses principales activités. Dans le même temps cette sous préfecture était une des rares à ne plus être reliée à son chef-lieu, Nantes, par une voie ferrée alors que la liaison Châteaubriant – Rennes n'avait pas cessé d'être exploitée. Cette erreur est aujourd'hui réparée.


interpète : Christine Dufourmantelle
source : Hélène Chaplais, d' Erbray (Loire-Atlantique) enregistrée le 25 septembre 1992 par Patrick Bardoul
catalogue P. Coirault : Les soldats partiront tous (Pressées de se marier 2 – N° 01123)
catalogue C. Laforte : La fille unique (II, O-32)

Le piocheur de terre

Mon père, je veux m'y marier avec un piocheur de terre (bis)
Ma fille tu as vingt ans passés
Nous t'y marierons gentiment
Tout le long du chemin d’fer

Et bien, ma fille, il faudra écrire à l'entrepreneur des routes (bis)
Pour qu'il t'y choisisse un amant
Et puis ton cœur sera content
Tout le long du chemin d’fer

L'entrepreneur nous a écrit une bien triste nouvelle (bis)
Nos chemins d’fer finissent partout
Nos terrassiers s'en iront tous
Adieu, petite lingère

L'entrepreneur nous a écrit une seconde nouvelle (bis)
Nos chemins de fer reprennent partout
Nos terrassiers reviendront tous
Courage, petite lingère

Qui a composé cette chanson, c'est trois piocheurs de terre
Etant à boire et à manger
Et leurs maîtresses à leurs côtés
Tout le long du chemin d’fer.


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