Chanson d'amour ou
chanson à boire ? « Si j'avais un bon ami »
pourrait être classée dans l'une ou l'autre de ces catégories.
Nous n'avons trouvé que deux exemples de cette chanson dans nos
archives. Celle que vous entendrez ici vient d'un cahier de chansons
des parents de Fernand Guériff. Elle a été publiée dans le
troisième volume de ses collectes (1). Elle y est présentée comme
une « chanson de noce ». Voilà peut être pourquoi l'ami
est y devenu un mari. Guériff la compare avec d'autres
exemplaires connus. Ce thème qui n'est pas si répandu est, en
revanche, bien diffusé : Québec, Louisiane, Wallonie, Jura,
Normandie, Morvan, Savoie...et Bretagne donc. Si la trame reste à
chaque fois la même, les couplets sont très variables.
Pour écouter la
chanson et lire la suite :
La seconde version
existant dans nos archives, sonores cette fois, vient du pays de la
Mée. Elle a été enregistrée en 1964 par Jean Tricoire, chez Mme
Tachet, à Lusanger. Vous pouvez l'entendre sur la base Dastumedia
(2). Cette fois la présence d'un couplet spécifique en fait une
chanson à boire :
A la santé des
patrons
faisons sauter
les bouchons
nous boirons à
la santé
de toute la
société
D'une version à
l'autre le texte de cette chanson se prête à bien des adaptations.
En fait un seul couplet revient à chaque fois, celui où il est
question de faire passer l'eau à son amie, son bon ami ou son mari.
Je lui ferai
passer l'eau
la rivière sans
bateau
On est très
clairement dans le domaine de la chanson d'amour. Mais les couplets
qui l'accompagnent peuvent lui donner une autre orientation. L'amour
toujours avec ceux qui s'adressent à l'ami, l'amant et même l'amour
filial :
Si j'avais des
p'its enfants
Qui
m'appell'raient leur maman,
J'leur donnerais
tout c'que j'ai,...
La rivière et le
moulin.
noté par Achille
Millien sur un air de bourrée du Morvan et popularisée, entre
autres, par Evelyne Girardon et Jean Blanchard.
Le couplet
sarcastique sur les belle mères est plus adapté aux repas de noces
où il est souvent d'usage de les railler gentiment. Et puisqu'on
parle de boire, nous l'avons déjà vu avec le couplet à la santé
des patrons. Celui qui suit vient d'une version canadienne (3) :
Une bouteille
vermeille
Sur la table qui
nous réveille
Prenons la, oui,
par le cou...
Faites lui faire
un petit glou-glou
Enfin, nous avons
évoqué la chanson de conscrits. C'est dans ce genre que l'a classé
Jean Garneret (4), sous le titre « les conscrits sans souci »
avec pour justification :
Si j'avais des
parents
qui ne m'envoient
pas d'argent
Je leur
souhaiterais souvent
oui bien souvent,
oui bien souvent
Je leur
souhaiterais souvent
Une mort
subitement
Il n'est plus
question de tordre le cou aux belle mères mais faut-il pour autant
prendre cette menace au sérieux ?
Coté mélodies, les
variations sont aussi nombreuses pour la première phrase, mais les
similitudes s'imposent avec la phrase suivante, toujours construite
sur la répétition :
Je lui ferais
passer l'eau
Oui passer l'eau
Oui passer l'eau
Le fait que cette
chanson soit connue un peu partout et y compris outre-atlantique
prouve son ancienneté. Mais nous n'avons pas réussi à déterminer
son origine. Qui pourra nous en dire plus ?
Notes
1 – est-il besoin
de vous rappeler que ces ouvrages, édités par Dastum 44 et le parc
naturel régional de Brière, sont toujours disponibles à un prix
dérisoire ? Voir rubrique « nos éditions »
2 – L'entendre
mais à condition de bien prêter l'oreille. L'enregistrement ancien
n'est pas de très bonne qualité (fichier n° a55969)
3 – sur le disque
« songs of french Canada » chez Folkways .
Enregistrements des années 50 présentés par Marius Barbeau
4 – chansons
populaires comtoises – J. Garneret / C. Culot – 1985 – tome 3,
page 579
interprètes :
Liliane Berthe + Janig Juteau et Martine Lehuédé
source :
Fernand Gueriff : cahier de chansons de ma mère et mon père –
tome 3 du Trésor des chansons populaires folkloriques du pays de
Guérande, page 39
catalogue P.
Coirault : 10435 si j'avais un bon ami (énumératives
diverses)
Las si j'avais un
mari
qui ne m'aimerait
qu'à demi
Je lui ferais passer
l'eau
Oui passer l'eau
Oui passer l'eau
Je lui ferais passer
l'eau
La rivière sans
bateau !
Las si j'avais une
belle mère
Qui me f'rait de la
misère
Je lui torderai le
cou
Oui rai le cou
Oui rai le cou
Je lui torderai le
cou
Et n'm'en f'rai plus
du tout
Las si j'avais un
amant
Qui m'aimerait
tendrement
Je lui ferai dès
demain
Oui dès demain
Oui dès demain
Je lui ferai dès
demain
Son bonheur et le
mien
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