vendredi 24 juillet 2015

115 - Le petit moine

La majorité des chansons qui trouvent place dans ce blog sont issues de collectes réalisées en Loire-Atlantique et mises en valeur par Dastum 44. Pour apprendre ces chansons vous disposez d'enregistrements numérisés, qui représentent des heures d'écoute (1). D'autres proviennent de sources plus anciennes, imprimées il y a plus de cents ans (Soreau, Guéraud...) ou plus récemment (Guériff, Dréan...). Nous les réinterprétons pour les rendre plus accessibles.
Une autre solution est d'apprendre directement des générations précédentes. C'est ce qu'a fait le chanteur que vous entendez aujourd'hui en apprenant le répertoire de ses parents. Suppression des intermédiaires : directement du producteur au consommateur !
La chanson du petit moine qui va voir les filles est présente dans tous les répertoires. L'histoire se déroule toujours de la même façon et la chute est identique. C'est souvent le refrain qui marque les différences d'une version à l'autre.


Le besoin de se moquer des moines apparaît dans de nombreuses chansons. Leur comportement justifiait sans doute ces moqueries. Nous avons aujourd'hui l'image d'un moine correspondant au type chartreux, reclus dans son monastère avec un vœu de silence et de chasteté. Il n'en a sans doute pas toujours été ainsi. Récits, romans et chansons nous rapportent des aventures de moines mendiant leur subsistance au contact de la population, et souvent adeptes d'un contact un peu trop rapproché avec les femmes. Il en est ainsi du moine confessant les filles, de celui couchant avec la fille aînée, de celui mis à la porte par la dame qui confisque ses habits, ou encore hébergeant une fille dans sa cellule...et donc de celui qui va traire les vaches.
La chanson permettait donc de se moquer ouvertement du clergé « régulier ». Elle n'oubliait pas non plus le clergé séculier si on s'en réfère aux nombreuses aventures attribuées aux curés. Ce sera pour une autre fois.
Revenons à notre petit moine. Un grand nombre de versions de cette chanson le présentent comme membre d'une congrégation basée à Saint Anne d'Auray, lieu de pèlerinage le plus fréquenté en Bretagne depuis les apparitions du début du 17ème siècle (2). La fille qu'il visite prétexte de son état de fatigue pour l'envoyer traire à l'étable. Ici la vache est trop fougueuse pour se laisser faire par un inconnu. Dans d'autres récits le moine confond vache et veau !
Notre version, apprise de sa mère par le chanteur, est assez proche de celle publiée dans le tome 3 des collectes de F. Guériff (3). Ce refrain n'est pas le plus courant, les formules en tantoulaire – ouiche tan laire semblant les plus prisées parmi quantité d'autres.

notes
1 – à sélectionner dans la base de consultations de Dastum
2 – en 1625 pour être précis
3 – page 48 dans les « chansons de Brière, de Saint Nazaire et de la Presqu'ile Guérandaise ». Voir rubrique éditions

source : Berthe Bourdaud, de Saffré (Loire-Atlantique), enregistrée en 1995
interprète : Yves Bourdaud – réponses : Jean-Louis Auneau, Francis Boissard, Dominique Juteau, Daniel Lehuédé
catalogue P. Coirault : Le moine qui va traire la vache (Moines - N° 09318)
catalogue C. Laforte : Le petit moine qui mignonnait (I, C–19)

Le petit moine

C’était un petit moine de la chapelle d’Auray
De la chapelle d’Auray
Qui allait voir les filles bien tard après l’souper
Dame, fallait voir comme il la secouait, sa robe, sa robe
Dame, fallait voir comme il la secouait, sa robe tant qu'il pouvait

Il allait voir les filles bien tard après l’souper
Bien tard après l’souper
Sur son chemin rencontre une jeune fille qui pleurait
Dame, fallait voir comme il la secouait, sa robe…

… Qu’avez-vous donc, la belle, qu’avez-vous à pleurer…

… J’ai mon ouvrage à faire, j’ai ma vache à tirer…

… N’vous en faites pas la belle, je vous la tirerai…

… La vache était jeunette, a joué du jarret…

… Renversé le p’tit moine et gâté tout son lait…


… Oh diable soit cette vache, jamais je n’la tir’rai.

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