samedi 18 juillet 2015

114 - Il est une fillette

Puisque les beaux jours de l'été nous incitent à fréquenter le bord de mer, voici une nouvelle chanson à résonance maritime. Il est d'usage dans certaines chansons de marins d'utiliser des termes techniques du bord pour désigner l'anatomie féminine. Ici, c'est toute la chansons qui est basée sur la comparaison entre la goélette et la beauté d'une fille. Sans que cela ne puisse passer pour une remarque sexiste, rappelons que dans la marine anglaise les bateaux sont systématiquement du genre féminin. La langue française est plus hésitante à ce sujet : un paquebot, un trois-mats, mais une chaloupe, une goélette...
Quand à l'analogie des termes utilisés, des questions restent sans réponse. Si les écoutilles sont passées dans l'argot pour désigner les oreilles, les écubiers sont plus malaisé à définir. Sur un bateau, ce terme désigne les orifices destinés au passage de la chaîne d'ancre. Mais ici, à votre avis ?
Mmmh ?
Passons à la suite.
Pour écouter la chanson et lire la suite



Nous avons extrait cette chanson des collectes effectuées par Raphael Garcia auprès d'une figure important pour le folklore maritime. Marcel Canonnet (1902-2004) a travaillé, entre autres, dans la marine et l'aéronautique. Militant syndicaliste, pacifiste et laïc, il a mené bien des combats tout au long de sa vie. La commune de Chateau-Thébaud, où il résidait, a donné son nom à l'école primaire.
Il possédait un répertoire important de chansons maritimes apprises de diverses sources. On lui doit, par exemple, les mélodies de chansons comme Gueule de Serpent (n°46 – novembre 2014) ou les canotiers de Loire (n° 28 – juillet 2013) uniquement connues jusque là par des sources écrites.
La chanson, sur un timbre connu, est interprétée ici comme une marche. Elle ne semble pas être liée à une quelconque activité de la navigation à la voile, malgré son thème. Les occasions de marcher son rares sur un navire; mais on peut rester marin même à terre !
Nos recherches sur l'origine de cette chanson nous conduisent, une fois de plus, vers le "barde" Théodore Botrel, grande vedette des cafés concerts au début du vingtième siècle. Un grand nombre de chansons de Botrel ont été adoptées et folklorisées par leurs interprètes. Si tous les chanteurs sont en mesure de nommer l'auteur de la Paimpolaise, il n'en est pas de même pour quantité d'autres chansons composées dans un style qui se voulait proche de la tradition. Celle ci est extraite d'un recueil intitulé "Chansons de Jacques la-Terre et de Jean la-Vague", publié en 1901. Son titre original est: la belle corvette.

source : collectage de Raphaël Garcia auprès de Marcel Canonnet, le 9 février 1991 à Château-Thébaud (Loire-Atlantique)
Chanson de Théodore Botrel, extraite des "Chansons de Jacques la-Terre et de Jean la-Vague"-  Édition : Paris : G. Ondet , [1901] (source: BnF)
interprète : Janick Péniguel

Il est une fillette

Il est une fillette, lonla, il est une fillette
Qu’a l’air d’une goélette, lonla, qu’à l’air d’une goélette
Qu’aurait été gréée, diguedon ma dondaine
Par les mains d’une fée, diguedon ma dondé

Elle est fringuette et brave, lonla…
De la poupe à l’étrave, lonla…
De la barre au beaupré, diguedon…
De la quille au hunier, diguedon…

Elle a deux écoutilles / Coquettes et gentilles
Et deux grands écubiers / Toujours bien éveillés

Ses haubans et ses drisses / Sont fins, soyeux et lisses
Le soleil, à son gré / S’amuse à les dorer

Quand elle a pleines voiles / Ses marins, jusqu’au moelles
Frémissent de fierté / Devant tant de beauté

La fillette est si belle / Y’en a point deux comme elle
De Nantes à Douarnenez / De Cancale à Tréguier.


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