vendredi 17 octobre 2014

76 - Chanson de la mariée

Inutile de s'étendre trop longtemps sur la chanson de la mariée. D'autres l'ont déjà fait. Nous vous renvoyons donc au tome 2 des collectes de Fernand Guériff, pages 193 à 214. Cet ouvrage consacré au folklore du mariage, publié par Dastum 44 et le parc naturel régional de Brière (1) est plus facile à consulter que les études consacrées à cette chanson par nos grands folkloristes, de Coirault à Davenson et consorts.
Ce n'est pas parce que cette mélodie est un saucisson (2) de la chanson traditionnelle qu'il faudrait se priver de l'écouter. Son charme désuet nous fait voyager dans le temps, à une époque où la cérémonie du mariage occupait une place plus importante qu'aujourd'hui.


Elle aurait été chantée au mariage d'Anne de Bretagne ; Elle a été citée par Madame de Sévigné et par Balzac, enregistrée par Maluzerne et par Hugues Auffray, imprimée en de multiples versions dans toutes les régions de France. Chacun de ces éditeurs ne manque pas de rappeler que cette chanson était plus populaire dans les provinces de l'ouest, Poitou et Bretagne, faisant référence aux aventures de la Duduche (3)...et à l'abbé Gusteau (4). Revoici donc, au passage, notre sémillant abbé qui délaisse ses conseils de jardinage (5) pour faire la morale à l'épousée. Laissons la parole à Fernand Guériff :
« Il (Gusteau) a voulu convertir une vieille chanson pour la rendre propre à catéchiser les écoutants ; elle équivaut à un véritable sermon » son texte est à l'origine des versions classiques, sur la base de versions plus anciennes. « Gusteau a du remanier certains couplets et en ajouter d'autres de son cru. De sorte... qu'on ne peut plus distinguer ceux qui sont entièrement de lui ou ont été adaptés par lui...on ne peut qu'entrevoir de ci de là des bribes de tradition anciennes » c'est le cas de l'expression du lien d'or qui ne se délie qu'à la mort, qui ne figure pas dans Gusteau.
Fernand Guériff publie un comparatif de versions collectées en presqu’île guérandaise. Celle dont nous nous sommes inspirées vient du répertoire de Jean Rivalant, grand chanteur du Bourg de Batz. Enregistrée en 1994, elle présente plus que des similitudes avec la version notée en 1895 d'Adèle Pichon, elle même du Bourg de Batz.


Notes
1 – et que vous pouvez toujours vous procurer en allant à la rubrique « nos éditions »
2 – au même titre que la Rosette de la quinzaine passée – voir note n° 5, chanson 74, septembre 2014
3 – pour les étrangers au pays nantais « les aventures de la Duduche » étaient des BD d'actualité de Nicolas de la Casinière, mettant en scène la duchesse Anne dans un cadre actuel, parues dans feu l'hebdomadaire « la Tribune ».
4 – abbé Gusteau (1699-1765) prieur de Doix près de Maillezais (Vendée), auteur de poésies patoises publiées en 1855
5 – profitez en pour écouter « le jardinier français », du même Gusteau – chanson n°49, mars 2014

chanson originale interprétée par Jean Rivalant, à Kervalet, Batz-sur-Mer (Loire-Atlantique) en 1994 - collectage de Roland Guillou et Robert Bouthillier
interprètes : Dominique Juteau & Daniel Lehuédé
catalogue P. Coirault : La chanson de la mariée (Noces - N° 05210)
catalogue C. Laforte : La chanson de la mariée (II, P-20)

Chanson de la mariée

Nous sommes venus vous voir du fond de nos villages
Pour célébrer la joie de votre mariage
A monsieur votre époux aussi bien comme à vous

Avez-vous bien compris ce qu’il a dit, le prêtre
Il a dit qu’il fallait, a dit qu’il fallait être
Fidèle à son époux et l’aimer comme vous

Quand on dit son époux, on dit souvent son maître
Ils ne sont pas si doux comme ils l’ont promis d’être
Faudra leur conseiller de se le rappeler

Si un jour il vous bat, ne soyez pas chagrine
Et surtout n’allez pas l’raconter aux voisines
Car par derrière de vous elles se moqu’rons de vous

Le connaissez-vous bien, oh, jeune mariée
L’indissoluble lien dont vous êtes liés
Connaissez-vous aussi tous les droits d’un mari

Mais vous l’avez juré sur le saint évangile
Et d’un ton rassuré et d’une voix facile
Que vous serez toujours fidèle à votre époux

Vous voici donc liés, madame la mariée
Ce n’est par pour un jour mais pour l’éternité
Avec un lien d’or qui dure jusqu’à la mort

Vous n’irez plus au bal, madame la mariée
Aujourd’hui grand régal mais la journée passée
Vous gard’rez la maison tandis que nous irons

Je vous jure que j’irai, mes très chers camarades
Après tout mon train fait et mon joli ménage
Au bal, à l’assemblée, avec mon bien aimé

Si vous avez chez vous des bœufs aussi des vaches
Des brebis, des moutons, des oisillons sauvages

Faudra soir et matin veiller à tout ce train  

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