Après les filles du Croisic, il y a
quinze jours, c'est aux filles de Saint Etienne que la chanson
traditionnelle rend hommage cette fois. Certes, le nombre de chansons
qui vantent les qualités (ou les défauts) des filles de tel ou tel
endroit est incalculable. La pluspart d'entre elles sont des chansons
à la dizaine où on se contente d'une affirmation « y'a cor'
dix filles à Nantes qui sont bien élégantes » ou « y'a
dix filles du Haut Bergon qu'ont des culottes et pas de boutons ».
Le couplet est ensuite décompté de dix à un.
Ici nous avons affaire à un texte qui
pour être court n'en est pas moins intéressant, à divers titres.
Le premier c'est la localisation de cette chanson. Inutile d'espérer
un refrain du style « allez les verts ». Notre Saint
Etienne est situé dans le pays nantais ; pour être précis,
Saint Etienne de Montluc, où ont été collectés ces vers (1) est à
mi chemin entre Nantes et Savenay. La chanson a été publiée par
Claude Pavec, auteur d'un recueil fin 19ème siècle, reprise par
Armand Guéraud et Fernand Guériff dans leurs ouvrages respectifs.
Et c'est tout. Le répertoire des chansons traditionnelles de Patrice
Coirault n'en mentionne aucune autre version. Les « filles qui
guérissent de la courte haleine » sont elles donc uniques au
pays nantais ?
Mais d'abord, de quelle chirurgie
s'agit-il ?
Ecouter la chanson et lire la suite
En quoi les filles de St Etienne ont elles une si
grande expertise ? La courte-haleine pouvait autrefois définir
des difficultés respiratoires, un grand essoufflement...que nous
définirions aujourd'hui comme de l'asthme. Il est curieux de
constater le nombre d'asthmatiques parmi les membres du clergé à
cette époque : trois moines, un chanoine, qui récompensent les
filles de cadeaux symboliques.
Une seconde version citée par Guéraud
ajoute d'autres récompenses
Qu’ont-elles
donc eu pour leur peine
de
beaux souliers de prunelle
un
tablier de futaine
un
bouquet de marjolaine...
Le
tissu d'indienne, un coton imprimé, était autrefois une spécialité
nantaise.
Mais,
si on recherche un peu plus avant l'origine de la courte-haleine on
finit par découvrir que l'expression, en argot du 19ème siècle,
avait une toute autre signification. Un sens caché qui nous paraît
plus approprié pour tous ces personnages. En effet un dictionnaire
de l'argot classique (2) assimile la courte haleine à un manque
d'ardeur amoureuse : « Être petit baiseur, se contenter
de tirer un coup ou deux et dormir après ».
Armand
Guéraud ne s'y trompe pas qui la classifie dans les chansons
plaisantes, au même titre que les filles de la Rochelle qui veulent
apprendre le pilotage avec leurs amants ou celles qui veulent un mat
dans leur navire.
Les
filles du pays nantais n'ont pas fini de nous surprendre.
Notes
1
– allez les vers ! - le recueil de Pavec publié en 1884 à
Savenay s'intitulait : chants populaires de la Haute-Bretagne
2
– ne cherchez pas; voici le lien :
Les
filles de Saint-Etienne
Ce sont les filles de Saint-Etienne,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
On dit qu’elles sont sirugiennes,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
On dit qu’elles sont sirugiennes,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Elles guérissent d’la courte
haleine, léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Elles guérissent d’la courte
haleine, léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Elles en ont guéri trois mouaines,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Elles en ont guéri trois mouaines ,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Trois moines et un chanouaine, léridon,
léridondaine, léridon, léridondon
Trois moines et un chanouaine, léridon,
léridondaine, léridon, léridondon
Qu’ont-elles donc eu pour leur peine,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Qu’ont-elles donc eu pour leur peine,
léridon, léridondaine, léridon, léridondon
Un bouquet de marjolaine, léridon,
léridondaine, léridon, léridondon
Un bouquet de marjolaine, léridon,
léridondaine, léridon, léridondon
Et un tablier d’indienne, léridon,
léridondaine, léridon, léridondon
source : non précisé,
Saint-Etienne-de-Montluc
collectage : Claude Pavec,
publié par Fernand Guériff « Le trésor des chansons
populaires… » - P. 75 et par Joseph Le Floc’h « Recueil
de chants populaires du Comté Nantais et du Bas-Poitou »,
p.556
Interprète : Françoise
Bourse
Catalogue
Coirault. : Les filles qui guérissent de la courte haleine
(02404)
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