La Limouzinière est un
petit bourg du Pays de Retz, proche du lac de Grand-Lieu. C'est là
qu'a été collectée notre chanson de la semaine. C'est une chanson
rare, en ce sens que son thème est peu répandu dans la tradition.
Ce dialogue entre deux jeunes femmes vante les joies du mariage. Une
exception, si on considère le nombre de textes et de mélodies qui
en détaillent tous les inconvénients. Le mariage est-il le tombeau
de l'amour ? Et la réponse à cette question peut-elle se
chanter ?
Pour écouter la chanson
et lire la suite :
Le répertoire de la
chanson traditionnelle est abondamment fourni en textes qui
détaillent les inconvénients du mariage : misère sociale,
maris cocus, femmes trompées, conjoints ivrognes ou feignants,
vieillards impuissants...sans parler de toutes ces aventures qui
transforment une idylle en drame. Dans une société où le mariage
dit « de raison » semble souvent prendre le pas sur les
désirs des amoureux, il ne faut pas s'étonner si la chanson ne
donne finalement que peu de témoignages de la réussite d'une union.
Si vous consultez le
catalogue établi par Patrice Coirault, la rubrique « épouses
contentes de leur mari » ne répertorie que deux chansons
types. Tandis que les chansons de maumarié(e)s se comptent par
dizaines et que les soucis du mariage, toutes catégories confondues,
représentent près d'une centaine de pages.
C'est donc bien une
chanson rare que nous vous proposons cette semaine.
Bien sur, il est des
chansons où une jeune fille se déclare satisfaite de l'attitude
d'hommes à son égard. On pense par exemple à la chanson des trois
jolis mineurs (1), dont un passage sonne presque comme notre
troisième couplet :
Encore mieux le
dimanche quand j’suis à la maison
L’un fait mon lit,
l’autre babille et l’autre chauffe ma chemise.
Mais il s'agit bien de
relations hors mariage.
Le plus étonnant c'est
que la seule catégorie de chansons qui représente presque autant de
volume que les inconvénients du mariage c'est celle des filles
pressées de se marier. Faut-il en conclure que, comme la presse qui
ne parle que des catastrophes, la chanson ne s'intéresse qu'à ce
qui va mal. Soyons réalistes : ce n'est pas au travers du
mariage que s'exprime la chanson d'amour. Et après, si tout se passe
bien, est-ce vraiment la peine d'en parler ?
Dans cette chanson, le
point de vue le plus important n'est pas celui de la cousine qui
détaille tous les avantages de sa situation, mais celui de la jeune
fille qui est impatiente de se marier alors qu'on lui recommande
d'attendre encore un
an.
Cette chanson possède une
mélodie originale qui suit une construction irrégulière. Elle a
déjà été enregistrée par Roland Brou, sur le CD « Trois
garçons du Lion d'or », un très bel ouvrage, tout à capella,
malheureusement difficile à se procurer aujourd'hui (2).
Alors profitez donc de
cette ré-interprétation.
A la semaine prochaine.
note
1 – voir chanson n° 57,
les trois jolis mineurs (mai 2014)
2 - Roland Brou – Trois
garçons du Lion d'or - chants et complaintes de Haute-Bretagne –
TVB productions RSCD 220 (1996)
interprète :
Barberine Blaise
source : Mme
Bruneau, de La Limouzinière (44) enregistrée en 1976 par Denis
Angibaud
Bonjour, ma cousine
Tiens, bonjour, ma cousine
Comment t’y portes-tu
Dans le ménage
Ton joli mariage
Tiens, bonjour, ma cousine
Comment t’y portes-tu
Grand dieu que je suis
aise
De m’avoir mariée
Mon mari m’aime
Plus que lui-même
Je suis aimée puis
emballée
Grand dieu que je suis
aise
De m’avoir mariée
Quand le dimanche arrive
M’emmène avec lui
Prend par ma manche
Par ma main blanche
Viens avec moi, je vais
avec lui
Quand l’angélus sonne
Me dit :
allons-nous-en
Viens, ma pouponne
Viens, ma mignonne
Oh, mon cœur, il est
temps
Quand j’ai mis dans ma
bouche
Cet excellent repas
Brosse ma couche
D’un ton farouche
Puis mes souliers et mes
bas
Et moi m’y couche
Et m’y réveille pas
Le matin m’y réveille
Deux heures avant le jour
Viens à l’oreille
Me dit : à merveille
As-tu bien dormi mes
amours
Quel beau discours
Ah, tais-toi, ma cousine
Car tu m’y fais languir
Toi, t’as un mari
Moi, je n’en ai pas
Tant que mon père me dise
D’attendre encore un an
Toutes les bêtises
Toutes ces remises
Sans les bêtises
Moi, je crois qu’il est
temps
Tant que mon père me dise
D’attendre encore un an.
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