lundi 22 octobre 2018

269 – le crime de Saint-Lumine


Dans quel monde est-ce qu'on vit. On n'est plus à l'abri de rien, ma bonne dame. Même à la campagne, la violence est partout ! Non, ce dialogue supposé n'est pas seulement d'actualité. Il se réfère à un crime de la fin du dix neuvième siècle. Comme d'habitude à cette époque, en l'absence des média modernes qui s'occupent quotidiennement de nous faire frémir à l'heure du repas, c'est la chanson qui s'est chargée de diffuser la nouvelle et ses détails très « gore »(1).
Pour écouter la chanson et lire la suite :


Cette complainte criminelle reprend en quatre couplets seulement, tous les poncifs du genre : crime et châtiment. En l'écoutant vous y trouvez comme un goût de déjà entendu ? C'est normal ; comme la plupart de ces complaintes elle a été composée sur un timbre existant. Bon sang, mais c'est bien sur ! C'est l'air du dialogue de l'eau et du vin, que nous avons publié sur ce blog au début de l'été (chanson n° 256 en juillet). Ce n'est pas le timbre le plus utilisé ; moins que Fualdès, la Paimpolaise ou le Juif errant, mais si vous remontez encore un peu dans nos archives vous retrouverez sur ce même air la complainte de Périer, sous le titre Au lever de l'aurore (chanson n° 167 en septembre 2016). Le début de la chanson nous renseigne aussi sur son ancienneté. La Loire-Atlantique n'est plus « inférieure » depuis plusieurs dizaines d'années déjà.
Le crime dont il est question date du 14 août 1894. Il a bouleversé la commune de Saint Lumine de Coutais, près du lac de Grand-Lieu. Vous trouverez tous les détails de l'affaire sur le site Criminocorpus. Le remarquable travail effectué par « Maxou » Heintzein permet d'y découvrir pour chaque complainte recensée le texte de la chanson et les détails du fait-divers. Ainsi, pour cette affaire, un extrait des débats du procès d'assises, publié dans la presse de l'époque, permet d'en savoir un peu plus. Au village de la Papinière, entre Saint-Lumine et Grand-Lieu, un tueur de porcs éventre une infirme de soixante quatre ans. C'est son geste, très professionnel, qui désigne le meurtrier. En revanche, on ne sait rien de son mobile. Une seconde complainte aurait été composée sur cet incident, sur l'air de Fualdès. Nous n'en avons pas les détails.
La complainte criminelle est un genre à part dans la chanson traditionnelle. Nous en avons déjà publié quelques unes (2), et on y prend goût. Vous aussi, parait-il. Alors nous vous en proposerons sûrement d'autres.

Notes
1 – nous nous permettons d'utiliser cet adjectif aussi sanguinolent qu'anglo-saxon pour le jeu de mots possible avec le marchand de gorets !
2 – pour les amateurs du genre : chansons N° 79 nov. 2014 – 118 sept. 2015 – 226 nov. 2017

interprète : Jean-Louis Auneau
source : auteur inconnu – cahier de chansons communiqué par Roland Brou au site Criminocorpus


Gens de la Loire-inférieure
Écoutez le récit
D'un crime qui fait frayeur
Au grand comme au petit
Un fait abominable
Dont s'est rendu coupable
Le tueur de porcs Pacaud
Qui a commis son crime
Sur une pauvre infirme
La fille Mignonneau

Une gardeuse de volailles
De Saint-Lumine de Coutais
Fut trouvée les entrailles
Complètement déchirées
Et qui sortaient du ventre
C'est ce qui épouvante
Son corps tout mutilé
Dans ce petit village
Trouver un tel carnage
Une femme assassinée

Ce criminel infâme
Ce tueur de bestiaux
Un soir chez cette femme
Armé d'un long couteau
Jusqu'à ce qu'elle expire
Le ventre il lui déchire
Comme Jack l'éventreur
Ce forfait dont on frissonne
Fait frémir les personnes
Même du plus mauvais cœur

Heureusement que la justice
Du canton de Saint-Philbert
Sur de certains indices
Bientôt à découvert
Qui était le coupable
De ce crime épouvantable
En cours d'assises le jugement
Condamne en quelques heures
Ce Jack l'éventreur
Au bagne pour vingt ans


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