vendredi 13 octobre 2017

219 - Quand Victorine va au marché

Victorine a eu un petit accident ! Encore une fille dont le cotillon devient trop long par derrière et trop court par devant. Les conséquences sont d'autant plus fâcheuses que le responsable de l'accident n'est pas prêt à prendre ses responsabilités. La situation est dramatique ; et pourtant la chanson déclenche plus de sourires que de pleurs. Ceci malgré un sordide marchandage où il plus question d'argent que d'amour.
Cette chanson est bien présente dans les collectes, anciennes ou récentes. La version que nous interprétons vient du pays de Châteaubriant. On en trouve plusieurs autres en Loire-Atlantique et dans toute la Haute-Bretagne.
Pour écouter la chanson et lire la suite :


Dans cette chanson le prénom de la jeune fille peut varier d'une version à l'autre : Florine, Joséphine, Jeannette ou Louise. Mais dans notre secteur géographique c'est Victorine qui est le plus fréquent. Quel que soit le prénom, ce qui ne varie pas d'une chanson à l'autre c'est l'entrée en matière : elle va au marché acheter des cerises. Autre constante : la somme demandée pour nourrir la mère et l'enfant est toujours de cinq à six cent francs. Exception faite pour Lucien Gicquel, notre informateur, qui est passé de la centaine au mille ; mais toujours cinq à six mille !
La réponse du militaire est bien pingre avec ses cinquante centimes. Dans d'autres chansons il proposes de dix à cinquante écus. Mais compte tenu de l'ancienneté du texte on aurait bien du mal à convertir tout ça en euros. Ce qui est plus important c'est la désinvolture avec laquelle il renvoie sa petite amie. Et encore, ici se contente-t-il d'un :
...c'est bien assez
Pour nous être si bien amusés.
Quand on entend parfois :
dix écus ça sera bien assez
Pour avoir eu ma virginité
ou encore
Cinquante écus c'est bien assez
Pour m'être si peu amusé
L'excuse du major ou des parents qui refusent le mariage est même parfois balayée d'un plus cinglant :
Si tu es enceinte de moi
C'est bien par ta bêtise
je t'avais toujours bien dit
Que tu ne m'aurais pas pour mari
Pauvre Victorine ! Et pourtant cette chanson utilise plutôt un ton comique que tragique. Si on veut la classer dans les avertissements aux jeunes filles, peut être faut-il se persuader que la dérision est plus efficace que les leçons de morale.

Interprète : Christine Dufourmantelle
source : Lucien Gicquel, de Saint-Vincent-des-Landes , enregistré en février 1988 par Patrick Bardoul et Lydie Pécot
catalogue Coirault : La fille enceinte d’un dragon (2318)
catalogue C. Laforte : La fille délaissée qui pleure (2-H-21)

Quand Victorine va t’au marché

Quand Victorine va t'au marché c'est pour acheter des c'rises ( bis )
Elle prend son p'tit tablier blanc
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Elle prend son p'tit tablier blanc
Pour cacher son p'tit accident (?)

Quand Victorine revient du marché, son petit cœur soupire ( bis )
Qu'avez-vous donc à soupirer
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Qu'avez-vous donc à soupirer
Dans les bras de vot' bien-aimé

Mon bel amant, si je soupire, c'est vous qu'en êtes la cause ( bis )
Vous avez dit partout
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Vous avez dit partout
Que j'étais en amour de vous

Si je suis en amour de vous, marions-nous ensemble ( bis )
Du mariage, n'en parlons pas
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Du mariage, n'en parlons pas
Car le major ne le veut pas

Si le major ne le veut pas, donnez-moi quelque chose ( bis )
Donnez-moi cinq à six mille francs
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Donnez-moi cinq à six mille francs
Pour nourrir la mère et l'enfant

Six mille francs c'est beaucoup pour un pauvre militaire ( bis )
Cinquante centimes c'est bien assez
Boute-ci, boute-ça, Victorine a fait ça
Cinquante centimes c'est bien assez
Pour nous être si bien amusés.


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