Les chansons de marins célèbrent les
exploits de la marine au long cours, des vaisseaux de guerre aux cap
horniers. Les couplets consacrés au cabotage sont moins nombreux et ,hélas, souvent liés à des événements tragiques. Encore que notre
chanson de la semaine traite la tragédie du Saint Boniface sous
forme de dérision !
Malgré nos recherches, nous n'avons pu
trouver trace de ce caboteur dont la réputation n'était guère
meilleure que celle du navire école de la semaine passée. Rien ne
permet d'ailleurs d'affirmer que le Saint Boniface ait réellement
existé et que cette chanson ne soit pas une simple fiction. Nous
lançons donc un appel aux marins chevronnés pour nous aider à
retrouver des informations sur le caboteur Saint Boniface, disparu au
large du Cotentin. Deux torpilleurs et un aviso envoyés sur zone
n'ont jusqu'ici rien trouvé, si on en croit la chanson !
pour écouter la chanson et lire la suite
Le texte de cette aventure maritime a
été vendu sur feuille volante à Guérande en 1929. Si on se réfère
aux paroles, le navire en question daterait donc des années1880/90.
La propulsion à vapeur, inaugurée en 1819 pour les navires
maritimes, s'est généralisée vers la fin du siècle. La marine à
voile, malgré son déclin, a encore servi jusqu'à la première
guerre mondiale. La voile est restée en service plus longtemps pour
le cabotage en raison des coûts importants du charbon par rapport au
tonnage transporté. Le Saint Boniface aurait donc fait partie des
navires modernes à sa construction, mais la chanson ne laisse aucune
illusion sur son état final, avec des termes fort imagés.
Toujours d'après la chanson le Saint
Boniface transportait du blé chargé au Havre, à destination de
Saint Nazaire. Jusqu'aux années vingt, le long des côtes de France,
les principales marchandises transportées étaient le charbon, les
grains, les minerais. Depuis le moyen âge les grains ont beaucoup
voyagé par mer. La fameuse chanson des navires de blé que trois
dames s'en vont marchander est là pour nous le rappeler. Sur nos
côtes deux autres marchandises ont constitué une part importante de
ce trafic : le vin, descendu sur la Loire d'Anjou ou du Pays
Nantais, et le sel. Avant que la concurrence des salines de l'est et
du sud ne provoquent leur déclin, les marais salants de Guérande et
de la baie de Bourgneuf exportaient sur toute la façade atlantique
et bien plus loin que les seuls ports français. Le sel de Guérande
s'est bien rattrapé depuis.
Nous avons sorti cette chanson de
l'oubli et des notes de Fernand Guériff, pour un concert donné au
musée de la marine en bois à Montoir de Bretagne. Un petit musée
captivant qui retrace bien l'histoire locale jusqu'aux chantiers
navals nazairiens.
De nombreux caboteurs furent construit
à Montoir, à l'embouchure du Brivet, au temps de la marine en bois.
Par la suite, cette activité donna naissance aux futurs chantiers de
l'Atlantique ou chantiers de « Penhoet », célèbres pour
avoir lancé au vingtième siècle des paquebots, comme le France ou
le Queen Mary 2, des supertankers et, aujourd'hui encore, des navires
de croisières.
source : Feuille volante,
vendue à Guérande lors des fêtes historiques en 1929 - publié
par F. Gueriff - tome 3 du Trésor des chants populaires
folkloriques du pays de Guérande – pages 353 – éd. Dastum 44 et
Parc naturel régional de Brière
paroles trad. - musique : J.
Juteau
interprètes : Janig Juteau
& Martine Lehuédé (chant) Jean-Louis Auneau (concertina)
Le Saint Boniface
S'en est allée dans la nuit claire
Porter son blé à Saint Nazaire
La vieille baille au père Angot
Vire-Ho !
Avait pour nom Saint Boniface
Et quarante sur la carcasse
Etait connue dans tous les ports
pare à Tribord
Pour conserver rivets sur tôle
Lorsque son flanc raclait un môle
Etait poilue comme un coco
Vire-Ho !
Avait des trous dans sa chaudière
Comme en a la gueule à Jean-Pierre
qu'a la vérole à Chandernagor
pare à Tribord
Beau soir de mai tout doux tout calme
Et la lune ainsi qu'à Las Palme
Brillait au ciel comme un douro
Vire-Ho !
Allait la baille lourd chargée
Crachant plus noire sa fumée
Que si le diable était à bord
pare à Tribord
Havre quittait sans vent ni vague
Avant d'arriver à la Hague
disparut dans l'incognito
Vire-Ho !
Ont du sauter chaudière et coque
Et s'emplir d'eau comme une moque
La baille emportant biens et corps
pare à Tribord
Durant trois jours lents comme barges
Ont exploré côtes et large
Deux torpilleurs, un aviso
Vire-Ho !
Casquettes bleues ont rencontré
Ohé ! La baille est assurée
Les armateurs sont des cochons
parez garçons
tres belle chanson interprétée egalement par Long John Silver
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