140 - La semaine du galant

Il s'en passe des choses en une semaine. Tout d'abord vous retrouvez sur ce blog une nouvelle chanson ; et dans cette chanson une intrigue complète qui débute le lundi pour trouver son dénouement le dimanche. Le galant presse sa belle de répondre à sa demande. Mais celle ci le fait lanterner et trouve à chaque jour un motif de remettre au lendemain. Habile façon de faire durer le suspense et la chanson ; ce qui nous garantit sept couplets avant l'épilogue qui nous renseigne sur les motifs de la jeune fille. Elle se venge à sa manière d'un amant qui l'avait délaissée.

Utiliser les jours de la semaine ou les mois de l'année est un procédé énumératif courant. Mais cette histoire d'amour en sept jours n'est pas si fréquente dans la tradition orale...

pour écouter la chanson et lire la suite :

Cette chanson semble plus connue de l'autre coté de l'Atlantique que chez nous. Conrad Laforte en a répertorié plusieurs versions au Canada, et aucune en France. Notons tout de même un enregistrement réalisé par Albert Poulain à Pipriac, en Ille et Vilaine (1), avec une fin assez curieuse et qui nous laisse sur notre faim :

Le dimanche jour de fête...on ne fait rien

Et dans l'église romaine le dimanche on ne dit rien

pour les autres jours de la semaine la situation est identique à notre version.

L'énumération des jours de la semaine en chanson donne parfois des situations répétitives comme dans cette rengaine où le petit prince vient nous « serrer la pince ». Là aussi la fin du couplet renvoie au lendemain.

D'autres chansons font une récapitulation cumulative où à chaque jour correspond un produit différend acheté au marché : des endives, du rôti, des radis, etc.

Nous avons déjà publié une version locale de la semaine ouvrière, adoptée par bien des corps de métier, avec la chanson des compagnons sergers de Guérande (2)

Plus proche de notre chanson est cette autre aventure où la narratrice est demandée, fiancée, mariée et divorcée dans la même semaine.

Le procédé n'est pas seulement utilisé dans la chanson traditionnelle. Le comique troupier Gaston Ouvrard a répété inlassablement un de ses grands succès – Mes tics - où il associe un bruit différent à chaque jour de la semaine et le dimanche les reproduit tous en même temps.

Cette liste n'est pas limitative. Peut être en aurez vous d'autres à nous signaler ?

Notes

1 - chanté par Mme Thérèse Bébin - reproduit dans les carnets de route d'Albert Poulain (édition Dastum / P.U.R.) page 214

2 – Au son de la navette - chanson n°127, novembre 2015

Interprète : Annick Mousset

source : Constance Crusson, de La Baule (Loire-Atlantique) collectage de Roland Brou en 1990

catalogue C. Laforte : La semaine de l’amoureux (IV, Ca-03)

La semaine du galant

Le lundi d’une semaine

Me levant de bon matin

Tout en passant par la plaine

Je rencontre sur mon chemin

Une charmante brunette

Et je lui tendis la main

Ah, monsieur, soyez honnête

Attendez donc à demain

Le mardi là dès l’aurore,

Je vais donc la trouver

Lui disant, belle je t’adore

Si tu voudrais m’épouser

Si tu voulais jolie brunette

Je te donnerais tout mon bien

Ah, monsieur, soyez honnête

Attendez donc à demain

Le mercredi la mâtine,

Ne peut plus me refuser

Sur sa bouche douce et fine

Je lui pose un doux baiser

Et par l’amour qui m’débine

Je voudrais aller bon train

Ah, monsieur, n’allez pas si vite

Attendez donc à demain

Le jeudi je pars de rage

Croyant toujours la décider

Pour donner son cœur en gage

Mais aujourd’hui je l’aurai

Et puis d’un amour extrême

Dis-moi si tu m’aimes bien

Ah, monsieur, si je vous aime

Je vous le dirai demain

Le vendredi je pars de suite

Croyant toujours la décider

Lui disant donc ma petite

Tu m’as promis un bouquet

Tu m’as promis une rose

Elle brillait dans ton au jardin

Mais monsieur elle n’est pas éclose

Attendez donc à demain

Le samedi chose certaine

Au serment je veux t’avoir

Dernier jour de la semaine

Comblera tout mon espoir

Arrangeons donc par son rire

Son regard toujours mutin

Elle a fini par me dire

Je vous le dirais demain

Le dimanche grand jour de fête

Je n’ai pas perdu espoir

Lui disant donc ma brunette

Tu as donc fait ton devoir

Tu m’as renié toute la s’maine

Aujourd’hui sans plus tarder

Je vais te dire avec peine

C’est que tu m’avais délaissé.