La
semaine passée nous avons tenté de comprendre les diverses raisons
qui pouvaient pousser un jeune homme à quitter son pays et sa belle
pour s'engager dans la troupe. Évidemment il manquait une raison à
ce départ : la contrainte. L'embarquement de force ou par ruse
est fréquent chez les marins. Il est plus rare chez les fantassins.
Dans les ports les jeunes gens désœuvrés qui commençaient à
boire avec un inconnu se réveillaient parfois en pleine mer. La
pratique du shangaÏage, ou enrôlement de force est plus rare dans
l'histoire de l'armée de terre. Il est vrai qu'une fois à bord d'un
bâtiment la désertion devenait difficile !
La
raison de l'emprisonnement du héros de cette chanson reste assez
obscure. Erreur de jeunesse ? conduite délictueuse ?
Toujours est-il qu'on cherche à s'en débarrasser. Le voilà
condamné à servir le
roi Suzon.
Si quelqu'un peut nous renseigner sur la réalité de ce personnage
cela nous permettrait d'éclairer un peu cette histoire. Faute de
mieux nous nous contenterons d'une possible interprétation erronée
de la chanteuse...ou du collecteur.
Notons
qu'au passage un de nos plus fidèles amis reprend du service...
écouter la chanson et lire la suite
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Le
rossignolet, ancêtre chantant du fax, de l'e-mail et du télégramme,
est à nouveau sollicité pour le service du courrier. A partir de
là, on rentre dans le sordide des négociations financières. La
libération de l'être aimé est subordonnée au paiement d'une
rançon. Parfois les beaux yeux d'une belle ou son « adresse »
suffisent à obtenir la libération. Souvent l'autorité ne veut pas
se laisser infléchir. Si Pernette avait eu des bagues à mettre au
clou ou des biens de famille à engager elle aurait évité à son
Pierre d'être « pendouillé ». Ici, l'attitude du père
de la belle renforce l'idée que l'amant incarcéré n'était pas
bien vu par la famille. Elle va devoir se débrouiller seule.
Ce
n'est pas la seule chanson qui mentionne ce genre de tractations. La
belle va finalement réunir cinquante pistoles et cinquante louis.
Dans la chanson anglaise « Geordie » (1) qui se rapproche
de la notre par cet épisode, la libération se négocie (selon les
versions) jusqu'à cinq mille livres. Une belle somme pour l'époque
(2) qu'il nous est difficile de comparer faute de cours du change. Au
moins la raison de l'emprisonnement de Geordie est clairement
indiquée : il avait tué un cerf sur les terres du roi !
Un motif qui en cachait certainement un autre plus politique.
Chers
amis vos éclaircissements, vos suggestions seront les bienvenus pour
nous aider à saisir toutes les subtilités de ce texte, qui reste
malgré tout une histoire d'amour qui ne finit pas en tragédie.
Notes
1
– Geordie (ou Georgie) est une des grandes complaintes du folk
anglais. Parmi toutes les versions enregistrées, écoutez celle
interprétée par Martin Carthy (disque « Crown of horn »
Topic 12TS300). Une petite merveille !
2
– oui, mais laquelle ? Selon les versions anglaises ou
écossaises l'histoire se situerait du 15ème au 16ème siècle. Il
reste à dater la nôtre.
J’ai bien eu du plaisir
J’ai
bien eu du plaisir le temps de ma jeunesse
J’avais
de sur ma table du pain aussi du vin
Le
soir à la chandelle pour passer mon chagrin
Au
loin m’en suis allé dans une hôtellerie
Dans
une hôtellerie, auberge accoutumée
Les
bourgeois de la ville m’ont rendu prisonnier
M’ont
mis les fers aux pieds, pesant bien cinq cents livres
Le
soir, quand j’y sommeille, je n’y fais que rêver
Le
jour, quand j’m’y promène, je ne fais que pleurer
Rossignolet
du bois, rossignolet sauvage
Va-t-en
dire à ma belle que je suis t’en prison
Que
je m’en vas t’en guerre servir le roi Suzon
La
belle s’en est allée au château de son père
Disant :
bonjour ma mère, mon papa où est-il
Donnez-moi
du finance pour avoir mon ami
Le
père y a répondu d’un air tout en colère
Belle,
vendez vos bagues, vos bagues et vos diamants
Vous
aurez du finance pour avoir votre amant
Elle
en a bien vendu pour cinquante pistoles
Pour
cinquante pistoles et pour cinquante louis
De
bagues et de finance : elle a eu son ami.
interprète
: Bruno
Nourry
source
/ collecte : Abel Soreau, à Vallet, le 31 août 1904,
auprès de Louise Denieul
catalogue
P. Coirault : Celle qui achète la délivrance de son ami
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toujours d'aussi jolies chansons! je me régale! et j'attends chaque semaine la nouvelle
RépondreSupprimermerci de nous les faire partager
Marie-Annick
toujours aussi jolies les chansons, j'attends avec impatience chaque semaine pour découvrir la nouvelle! merci beaucoup de nous les faire partager
RépondreSupprimerMarie