Individuels ou collectivitées, nous avons tous un goût prononcé pour les anniversaires. Malgré une actualité bien occupée par les jeux olympiques, l'été 2024 n'a pas échappé au feuilleton des cérémonies commémoratives de la libération de 1944. Il est vrai que certaines tragédies méritent d'être rappelées, aussi bien pour ceux et celles qui les ont subies que pour les générations suivantes qui n'ont qu'une vague idée des drames vécus. D'autant que la race des autocrates et autres dictateurs étant loin d'être éteinte, une petite chanson peut aider à rafraichir la mémoire.
Pour écouter la chanson et lire la suite :
L'ignoble personnage dont il est question dans la chanson a eu tous les honneurs dans toutes les formes d'art le tournant en dérision ; le cinéma avec Chaplin, le théatre avec Brecht. La chanson participe elle aussi à cette raillerie, même si le responsable des paroles est resté caché sous le pseudonyme de « FIZA » et n'atteint pas la renommée des deux illustres auteurs. D'autres chansons ont probablement vu le jour sur ce même thème. Celle-ci nous est parvenue par le biais d'une feuille volante recueillie au hasard de collectes en milieu rural.
L'utilisation du timbre d'une chanson traditionnelle en particulier ne doit sans doute rien au hasard. Non pas que celle-ci ait été particulièrement en vogue dans le secteur concerné. Mais sans doute parce que cette chanson a connu un certain succès sur les ondes et via le 78 tours au cours de la décennie précédente. Dans les années trente, plusieurs artistes de variétés ont, en effet, inclus « son voile qui volait » dans leur répertoire.
La chanson semble particulièrement dévalorisante pour la profession des peintres en bâtiment, bien mal représentée par cet individu en particulier. Certes la profession ne réclame pas de longues études ni une haute technicité. Mais si l'histoire a bien voulu reconnaître dans le petit moustachu un membre de cette corporation, elle passe rapidement sur le fait que la fréquentation dans sa jeunesse des milieux artistiques ne lui ait pas permis d'y faire carrière. Un ressentiment de plus pour faire grossir un désir de vengeance. Le troisième Reich y a probablement gagné une propension à s'attribuer les œuvres d'art des pays conquis. Rappelons aussi que l'intérêt d'Adolf pour la peinture a permis à l'un de nos grands artistes de variété, Georgius, en 1939 d'obtenir un succès avec une chanson sur le même sujet : « Il travaille du pinceau ».
Quel intérêt, nous direz-vous, de ressortir ainsi une chansonnette sans envergure, hormis l'aspect factuel et commémoratif ? Il suffit pourtant d'ouvrir les yeux. Il ne se passe pas une semaine dans notre beau pays sans qu'un magazine ou une revue ne tire prétexte historique ou culturel pour faire sa une avec le personnage dont la mèche volait. La figure d'Hitler et de ses crimes fait vendre du papier. On se demande parfois si derrière cette exploitation mercantile il n'y a pas une certaine complaisance. D'autant que ses idées extrémistes ont toujours bonne presse dans certains milieux. D'autant que de par le vaste monde des individus avec ou sans mèche qui vole au vent, prennent modèle sur personnage, se prenant pour de « grands conquérants » et entrainant dans leur sillage tous ceux qui veulent bien se laisser mener par le bout du nez.
Alors, si une petite chanson de rien du tout peut rappeler, à l'occasion d'un anniversaire, que la paix et la fraternité ne sont jamais acquis tant que sévissent ce genre d'individus, ça vaut le coup de la chanter. Tant pis si l'air vous reste dans la tête ; il fait partie des rengaines dont on se débarrasse difficillement. Vous pourrez toujours vous reporter à l'une des versions originales, par exemple la chanson n° 180, de décembre 2016 du blog de Dastum 44.
J-L. A.
Interprètes : Nicole Barbaud, Liliane Berthe, Christine Dufourmantelle et Jeannette Lebastard Source : archives Dastum 44, fonds Patrick Bardoul
Timbre : Son voile qui volait – Auteur : Fiza (?)
Refrain
Sa mèche par ci, sa mèche par là
Sa mèche qui volait, qui volait
Sa mèche qui volait au vent.
1. C’était un pauvre bougre
Un peintre en bâtiment - Bis
Du haut de son échelle,
Il bâtit un grand plan.
2. Prenant la peinture verte
Comme signe de ralliement - Bis
Il parcourut le monde
Tel un grand conquérant
3. Entraînant à ses trousses
Un bande de sacripants - Bis
Gringalets, vieilles badernes
Qui nous vendaient lâch’ment.
4. Mais finie la belle vie
Voici l’débarquement - Bis
Chacun part ventre-à-terre
Adolphe au premier plan.
5. Cette fois la Providence
L’a bien foutu dedans - Bis
Adieu Europe nouvelle
Reich et tout l’tremblement
6. La morale de l’histoire
La voici simplement - Bis
C’est qu’il nous faut moins bête
Et bien plus compétent
7. C’est qu’il nous faut moins bête
Et bien plus compétent
Pour redorer la France
Qu’un peintre en bâtiment.
A
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire