samedi 15 janvier 2022

400 - Autour du moulin à vent

 Quatre cent chansons dans ce blog et toujours une seule interprétation de la chanson des trois canards ! Une lacune qu'il s'agissait de combler au plus vite. Pour marquer ce passage vers une centaine de chansons supplémentaire il fallait une interprétation sortant de l'ordinaire. Elle a donc été confiée à la jeune génération ; celle qui n'a pas connu les interprètes originaux ; celle pour qui le travail de Dastum 44 tout au long de ces trente dernières années prend tout son sens : collecter, sauvegarder et transmettre.

pour écouter la chanson et lire la suite :

Il faudrait probablement un ouvrage complet pour faire le tour de cette chanson emblématique. Deux raisons principales à cela. La première c'est que malgré l'ancienneté du texte, sa concision et sa fréquence, personne n'a été en mesure d'en donner précisément l'origine ni la signification. Se contenter de la considérer au premier degré, comme pour beaucoup de textes tombés dans le répertoire enfantin, c'est sans doute faire l'impasse sur une signification plus symbolique. Mais donner une interprétation à cette aventure énigmatique peut se révéler très hasardeux.

La seconde raison c'est que nous sommes en présence du plus grand tube de la chanson traditionnelle, en tête du hit parade depuis belle lurette (1). Pas une autre chanson qui la surpasse en quantité dans les recueils d'airs populaires, dans les collectes de terrain ou dans les enregistrements sur disques. Le nombre de versions connues se chiffre en centaines. Songez donc qu'en préparant le CD « chants à la marche en Loire-Atlantique » nous en avions recensé plus de 25 versions différentes (mélodies, refrains) ; rien qu'en chants adaptés à la marche et sur ce territoire somme toute limité. Ajoutez à cela que les paroles évolutives et adaptables à chaque air permettent de multiplier ces chiffres et vous comprendrez pourquoi les trois canards n'ont pas fini de nous faire chanter.

L'une de ces versions les plus connues est associée au moulin. Mais il s'agit d'un moulin à eau :

Moi, je ferai faire, un petit moulin sur la rivière

Dans celle ci c'est de moulin à vent dont il est question. Sans vouloir se lancer dans une étude économique de la société rurale ancienne, force est de reconnaître que ce lieu symbolique et si souvent chanté y tient une place importante. De même, l'incipit habituel qui parle de faire un étang dont on sait généralement qu'il n'est

Pas profond comme il est grand

pourrait nous entraîner dans des considérations historico-économiques sur une période où la réalisation de ces pièces d'eau correspondait aux besoins : alimentation, irrigation, pisciculture, etc. Quand on vous dit qu'il y a matière à disserter sur ce texte ! Nous nous contenterons aujourd'hui d'y relever la présence d'une bergère. Pas de doute, on est encore dans une économie agro-pastorale : étang, moulin, troupeaux...et chansons où le fils du roi a l'habitude de harceler les bergères. Ayant traversé les siècles, l'histoire a conservé toute sa capacité d'adaptation. La preuve en écoutant une chanson à la dizaine collectée dans le même secteur (2) et reprenant les paroles du refrain :

Voila un an sous le moulin à vent (bis)

Sous le moulin à vent y'avait une bergère

Qui chantait si bien « viens poupoule viens »

Et la suite ? Nous direz vous. La chanson s'arrête ici sur la dénonciation de la méchanceté du fils du roi. Nous vous laissons la liberté d'imaginer cette suite. Si le canard devient habituellement une source de richesses sous forme d'or, argent et diamants, l'usage qui en est fait se prête à tant de fins différentes que, là encore, vouloir les recenser serait fastidieux.

Ceci étant dit, on ne nous empêchera pas de revenir sur ce thème tant en raison de sa diversité que de ses possibilités d'improvisation. Comme le disait le sketch de Robert Lamoureux (3) : « le canard était toujours vivant ! ».


notes

1 - difficile de faire plus précis comme datation. C'est le cas depuis que les chansons ont commencé à être recueillies.

2 - enregistré chez Roger Pinard à Saint-Vincent-des-Landes, en 1979, par Patrick Bardoul. A écouter sur Dastumedia. Bien sur, elle fait référence à la célèbre chanson du répertoire 1900 de Félix Mayol.

3 - Désolés pour les plus jeunes d'entre vous, ça remonte aux années 1950 ; mais ça vaut toujours le coup d'être écouté. 


interprètes : Judith, Zéphyr et Auguste Dousset

Source : Francis Lemaitre, de Sion-les-Mines (Loire-Atlantique) enregistré le 30 janvier 1992 par Patrick Bardoul, Robert Bouthillier, Lydie Pécot, et Pierre Guillard,

Catalogue P. Coirault : Le canard blanc (lyriques -00102 )

Catalogue C. Laforte : Les trois beaux canards I, B-07 0


Mon père a fait faire un étang

Autour du moulin à vent

Autour du moulin à vent

Autour du moulin y'avait une bergère

Qui chantait si bien que son amant revint


Trois beaux canards s'en vont nageant

Le fils du roi s'en va chassant

Avec son beau fusil d'argent

Visa le noir tua le blanc

Oh ! fils du roi tu es méchant

Tu as tué mon canard blanc.


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